[DitV] La faute aux dés ?

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[DitV] La faute aux dés ?

Message par Steve J » 06 Fév 2013, 15:17

J’en parlais rapidement dans mon premier CR sur le forum, j’ai joué à Dogs in the Vinyard avec Fabien lors d’un atelier JDR aux caves alliées. La partie fut si exceptionnelle que je décidais immédiatement d’importer le jeu à « ma » table. La partie qui s’en suivi ne fut pas du tout satisfaisante et ce CR sera celui d’une partie ratée.
Une petite précision, je sais qu’il m’arrive de lire des CRs pour découvrir des jeux auxquels je n’ai pas encore joué. Je pense que ça sujet n’intéressera que ceux qui connaissent déjà Ditv, on va entrer dans le détail des règles de résolution et je ne rappellerai pas le système du jeu.

Configuration de jeu : 3 participants
J’étais le MJ et je faisais jouer deux joueurs que je connais très bien (et pas seulement parce que nous avons partagé des dizaines de parties de JDR depuis presque 10 ans). Il y avait dans mes deux joueurs ma copine qui n’aime les système de résolution que quand ils sont en retrait, on en discutera dans la suite de mon CR mais ce qui la gêne n’est pas tant le fait de lancer des brouettes de dés que le fait de devoir faire des choix tactiques basés uniquement sur le système et déconnectés de ce qui est raconté.

Le village
J’évite en général de le faire mais j’ai repris le village que Fabien nous avait fait jouer (j’ai quand même relancé les dés pour retirer les fiches des PNJs) en lui piquant ses documents. Je me permets de tout recopier ici (ATTENTION !!!, si j’ai bien compris Fabien a l’intention de le réutiliser -notamment avec Romaric- si vous avez l’intention de jouer à Dogs avec lui prochainement tenez-vous éloigné de ce CR).
J’évite en général de le faire parce que je suis souvent déçu quand je cherche à réutiliser un scénario qui a donné une excellente partie. Peut-être parce que je perds en spontanéité, en tant que meneur il est possible que j’ai cherché à reproduire des scènes qui avaient marché dans ma partie précédente en faisant de mon « village » un « scénario » avec ce que cela implique de scripts.
Fabien a écrit :Orgueil

Frère Azariah est l’Intendant du village et considère qu’il doit vivre dans un grand confort matériel à
cause de sa lourde charge.

Frère Virgil est certain qu’il ferait un meilleur travail comme Intendant que Frère Azariah. Il sait que
Sœur Mindwell (la femme de Frère Azariah) vole dans le grenier.

Injustice

Frère Azariah prélève des taxes pour son propre bénéfice plus lourdes qu’il ne devrait.

Sœur Mindwell vole dans les greniers de la ville pour donner à manger à la famille de son amant,
Frère Cyrus.

Frère Azariah récolte bien au-delà de ses terres, empiétant largement sur les champs d’une famille
de Gens de la Montagne converti, dont le fils aîné est Frère Cyrus. Ils n’osent pas se plaindre par peur

Péché

Frère Azariah est marié à Sœur Mindwell, ils ont deux enfants adolescents, Frère Elijah et Sœur
Hester. Il bat sa femme pour des motifs triviaux, juste pour exercer son autorité.

Frère Azariah organise régulièrement des expéditions avec Frère Virgil et Frère Phineas pour
menacer la famille du Peuple de la Montagne convertis.

Sœur Mindwell a une liaison régulière avec Frère Cyrus (plus jeune qu’elle et non-marié), ils sont
vraiment amoureux.

Frère Elijah et Sœur Hester, frères et sœurs de sang, sont amants en secret et s’aiment
véritablement. Ils voudraient pouvoir se marier. Le Roi de la Vie a béni leur union : Sœur Hester est
déjà enceinte ; ils le savent mais ils gardent le secret.

Attaques démoniaques

Des insectes attaquent les récoltes, qui sont exceptionnellement pauvres cette année. Les habitants
du village ont faim.

Fausse doctrine

Frère Azariah est convaincu que les Gens de la Montagne convertis doivent souffrir afin de montrer
qu’ils ont véritablement abandonné leur ancienne foi.

Frère Cyrus est convaincu que les autres gens de la Foi n’ont pas la vraie Foi et que donc 1. le mariage
de Sœur Mindwell et Frère Azariah n’est pas valide et que donc il pourra épouser Sœur Mindwell dès
que possible, 2. voler les autres gens de la Foi n’est pas pécher.

Ce que veulent les PNJs

Frère Azariah veut que les Dogs approuvent sa vendetta contre ceux du Peuple de la Montagne.

Frère Cyrus veut que les Dogs mettent fin au vol de récolte de Frère Azariah, à ses menaces, et au fait
qu’il batte sa femme, annulent son mariage avec Sœur Mindwell et la marient avec elle.

Sœur Mindwell veut que les Dogs la marient avec Frère Cyrus, sans forcément remettre en cause son
mariage avec Frère Azariah.

Frère Elijah et Sœur Hester veulent que les Dogs les marient officiellement afin que leur union ne soit
plus un péché et qu’elle soit reconnue par tous. Ils veulent également que les Dogs mettent un terme
aux mauvais traitements que leur père fait subir à leur mère.

Frère Virgil veut que les Dogs démettent Frère Cyrus de ses fonctions et le nomment Intendant. Il
veut aussi (comme beaucoup de gens dans le village) que Frère Cyrus arrête de prélever des taxes
excessives et que Sœur Mindwell arrête de voler dans le grenier.

Ce que veulent les démons

Les démons veulent que le village se transforme en un bain de sang, d’une part, et que le mariage
perde de sa sacralité d’autre part. Ils aimeraient que les Dogs usent de violence pour régler tous ces
problèmes et se barricadent derrière leurs règles pour justifier leurs actes.

Si les Dogs n’étaient jamais venus, Frère Azariah aurait finalement découvert 1. que sa femme le
trompe, avec un membre du Peuple de la Montagne en plus 2. que ses enfants couchent ensemble.
Il aurait tué sa femme à force de la battre puis chassé ses enfants, avant de réunir ses partisans
pour exterminer la famille du Peuple de la Montagne. Après être devenu un tyran régnant sur le
village en solitaire, il aurait été détesté de tous et finalement abattu dans le dos par Frère Virgil avec
l’approbation silencieuse de tout le village. Frère Virgil serait devenu l’Intendant du village. Sœur
Hester et Frère Elijah se seraient enfuis de leur foyer pour vivre de rapines à la lisière du village ; elle
serait morte en couche, il aurait vécu comme un paria et serait finalement mort de faim ; leur bébé
aurait été adopté par une famille ne connaissant pas son origine.


Entrons maintenant dans le vif du sujet. Je vais me contenter de « zoomer » sur quelques scènes qui n’ont pas du tout fonctionné et chercher à expliquer pourquoi.
Je ne me souviens plus des noms des deux frères créés par les joueurs* mais il s’agissait de PJs très croyants ayant de nombreux traits du type « je crois dans le livre de la vie », « proche des écritures », etc, etc. Ces deux personnages étaient a priori intéressants car la partie allait être l’occasion de confronter leur naïveté à une réalité rugueuse (je notais avec un petit sourire en coin que le personnage de ma copine ressemblait beaucoup à celui que j'avais joué moi-même).
Le personnage de ma copine était le neveu de frère Azariah et de sœur Mindwell.

Le problème est apparu dès les initiations : les personnages étaient des sortes de Josephine ange-gardien ! Ils n’avaient pas besoin de recourir à la violence car ils parvenaient à résoudre les conflits par la parole, à la fois parce qu’ils étaient chanceux aux dés** et parce leur traits rendaient inutiles l’usage de la violence.
Évidemment les dilemmes sur le mode de « jusqu’où êtes vous prêts à aller pour atteindre vos objectifs » étaient un peu absents.

Première initiation :
Ma copine souhaitait que son Dog perde un peu de sa naïveté. J’ai décidé de le confronter à une scène de violence (piquée sur la partie que m’avait mené Fabien) : un homme battant une jeune fille qui venait de le voler.
Pas de chance : ma joueuse fait un lancé de dés remarquablement élevé. Elle parvient sans problème à résoudre la situation par le dialogue. Au moment de choisir quel trait lui ajouter il m’était difficile de respecter sa demande initiale.
Pour cette scène, Fabien m’a fait remarquer que j’aurai du jouer un conflit entre le personnage et sa naïveté : ma scène n’était pas adaptée.


Deuxième initiation :
Le Dog de mon deuxième joueur cherche à impressionner son mentor (qui fait partie des Dogs). Ils croisent une femme du peuple de la montagne au milieu d’une plaine désertique. Celle-ci est affamée et tient contre elle le cadavre de son bébé. Elle refuse leur aide, son enfant est mort sur des terres proches d’un village des Dogs et elle accuse le Roi de la Vie d’être responsable de cette tragédie.
La scène est plus intéressante, la femme insulte la foi du joueur, la discussion est plus animée. Mais encore une fois, la scène est résolue par le seul dialogue.


Cette terrible absence de dilemmes s’est malheureusement propagée pendant la partie elle-même. Et je m’obligeais à réduire les enjeux des conflits pour éviter que la naïveté de mes PJs emporte tout sur son passage. Un exemple :

L’arrivée chez Frère Azariah
Frère Azariah a proposé aux joueurs de venir diner chez lui (rappelons qu’il bat Sœur Mindwell, la tante d’un des PJs). Je l’avoue j’avais en tête cette scène de ma première partie où -en plein repas- Sœur Mindwell renverse un plat ce qui provoque la colère de son mari qui la frappe violemment devant les invités.
Arrivés dans la maison, Sœur Mindwell ne vient pas les accueillir (« elle s’occupe du repas »), son neveu PJ va la voir dans la cuisine, remarque qu’elle a une trace de coups sur son visage. Sœur Mindwell prétend être trombé dans les escaliers, le PJ ne la croit pas et je lance un conflit pour lui faire avouer la vraie raison de ces marques. Le PJ parvient à lui faire avouer la source de ces marques mais Sœur Mindwell lui demande de ne rien dire (« Frère Azariah n’est pas toujours comme ça, c’était ma faute si je l’ai mis en colère »).
(Je sais que c’est une erreur de lancer un conflit pour révéler/ou non des éléments de l’intrigue. Je me suis à la fois fait prendre par la force de mes habitudes et par le fait que j’avais au fond de moi envie que les joueurs soient surpris par la réaction de Frère Azariah).

Les PJs vont quand même s’installer à table et je joue quand même la scène où frère Azariah frappe sa femme devant les invités. Cela mène évidemment au conflit. Comme d’habitude mes joueurs font un score exceptionnellement élevé, ajoutons qu’il s’agit d’un conflit à 2 contre 1 ce qui ne laisse pas beaucoup de chance à Frère Azariah.
Encore une fois le conflit est très décevant, Frère Azariah escalade en sortant les poings mais cela ne suffit pas à créer du dilemme : les joueurs décident de continuer à le raisonner par les mots. Ils y parviennent. Josephine Ange-Gardien au Far-West…Yiheah…


Une remarque quand même, le système de résolution est très présent. Mes joueurs passent pas mal de temps à optimiser les dés utilisés dans leurs relances. Cet aspect tactique les sort de la fiction. Ils soulèvent un problème que j’avais déjà remarqué lors de ma partie avec Fabien (c'est bien la seule critique que j'aurai pu formuler vis à vis du système) : il arrive qu’un joueur enchaine une réplique à une attaque de l’adversaire et une attaque. Exemple :
Dog (Raise) : «Frère Azariah, la parabole de Jacob dans le livre de la Vie nous montre qu’il faut accepter ce que l’on a perdu. Sœur Mindwell a renversé notre repas mais vos coups ne le feront pas revenir dans nos assiettes »
Azariah (Riposte) : «Quand on gère un village comme je le fais, on ne peut pas se permettre de se référer au livre de la Vie. »
Azariah (Raise) : « Sœur Mindwell aura appris une bonne leçon aujourd’hui. Elle cessera d’être maladroite demain. »


Ici le joueur aimerait intervenir entre les deux dernières répliques de Frère Azariah et répondre à l’objection sur le livre de la Vie. Le système l’en empêche…

En conclusion : la partie ne s’est pas bien passée du tout. Elle enchainait des discussions longuettes, sans enjeu et sans dilemme. Il y a certes une malchance exceptionnelle dans les lancers de dés mais c’est le système de résolution lui-même qui fut mal vécu à notre table.
Même si j’identifie déjà quelques erreurs dans ma maîtrise, il me semble quand même que ma partie soulève de difficultés que je ne me vois pas résoudre d’un claquement de doigts (problème de séquençage des échanges verbaux, problème de la tentation d’optimiser longuement ses « coups » lors des conflits, trop grande puissance des PJs qui se mettent à 2 contre 1). C’est bien dommage : j’ai très envie de réussir à retrouver les sensations de ma première partie.
Notons que la partie s'est terminée de façon assez ironique. J'ai décidé de provoquer une scène de violence, frère Azariah et ses acolytes attaquant la maison de Frère Cyrus. Pour la première fois de la partie mes joueurs se sont pris des retombées. Dont 3D10 pour un joueur. Croyez le ou non mais il est mort sur le coup...Ce que nous avons vécut ce soir là, aucun probabiliste ne l'avais jamais vécu...

*Remarquons qu’ils étaient tous les deux de sexe masculin. Ma copine ayant crée un frère et non une sœur. Les prérogatives des Dogs ne dépendent pas de leur sexe mais -une fois terminée leur carrière de Dog- la position sociale de la femme ne traduit par la qualité de son mariage. Il m’a semblé que cet aspect l’a agacé et que c’est avant tout pour ça qu’elle a joué un frère et non une sœur.
**D'où le titre du sujet. Je pense que mes joueurs et moi pouvons raisonnablement prétendre à être compétents en théorie des probabilités. Nous fûmes pourtant continuellement soufflés par la faiblesse des jets du MJ et par la puissance de ceux des PJs.
Steve J
 
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Re: [DitV] La faute aux dés ?

Message par shiryu » 06 Fév 2013, 17:50

Je vais tenter d'apporter quelques éléments mais, la faute à Christoph, je me rend compte que je suis de moins en moins compétent avec dogs (j'ai utilisé ce système au départ pour mon jeu mais comme Christoph m'a poussé à me l'approprier, j'utilise aujourd'hui quelques différences et le pire, c'est que je ne sais plus la part originelle).

Pour les dés d'abord car là, on devrait être tous d'accord (il n'y a pas de faute de joueur ou de MJ) : je peux te dire que mon joueur (Jeronimo) doit être vert de jalousie. D'habitude, c'est moi (le MJ) qui fait des scores énormes tandis qu'il cumule les 2 (sauf ses d4 qui font 4, ses meilleurs scores, c'est pour dire...). On pourrait dire que ça change tout, et pourtant, c'est quoi le but du conflit ? Qu'à un moment, l'enjeu oblige à faire des concessions, prendre des risques, plein de choses... pour que ça ne soit pas juste réussi/raté. Si on est d'accord là-dessus, je poursuis.
Je vais présenter comment ça se passe pour mon joueur malchanceux et je vais essayer de projeter dans le sens inverse.
Mon PJ est quand même là pour améliorer les choses dans le village. Quand il voit que le conflit est mal barré, il va soit porter une attaque qui pourrait piquer si elle passe (d'accord, il faut 2 bons dés mais seulement 2 dés, les autres peuvent être pourris) et forcer l'adversaire à abandonner, soit abandonner lui-même parce que ça ne sert à rien de poursuivre et revoir son approche pour obtenir une autre victoire ailleurs (conflit suivi, en plus il garde un dé bonus, on dirait que les règles sont faites pour ça...).
Ton PNJ a une histoire à lui, il ne tape pas sa femme parce qu'il ne sait pas que c'est pas bien. Il a lui aussi des intéret dans l'histoire à garder ou à gagner. Ce n'est pas parce que Josephine arrive et lui dit "tu vois, c'est pas bien, il faut arrêter" qu'il va le faire ou qu'il peut le faire. Il doit lui aussi avoir des arguments chocs pour déstabiliser les dogs en 1 seule attaque (si les dés lui permettent), soit il peut abandonner et reprendre depuis un nouvel angle d'attaque (en profitant du dé bonus).
Le but de lancer pas mal de dés selon moi, c'est de pouvoir répartir la chance durant le conflit. Bien sûr que des fois, ça ne veux pas. Mais c'est en multipliant les conflits que la chance va se rééquilibrer. Pour moi, ce n'ets pas un échec de voir un conflit s'arrêter en 1 ou 2 attaques. Au contraire même, je ne vois aucun intéret à avancer des dés pendant 10 minutes pendant que le malchanceux rame pour survivre. Selon moi encore, si les dés sont visibles, c'est aussi pour ça : l'adversaire est bien plus fort que moi sur ce plan, je laisse filer".
Ca, on va dire que c'est la théorie, de comment s'adapter à un coup de cul. Maintenant en pratique, il ne faut pas perdre de vue que se qui est décrit durant une attaque se passe réellement, sauf si elle est contrée avec 1 seul dé.
Par exemple :
Dog (Raise) : «Frère Azariah, la parabole de Jacob dans le livre de la Vie nous montre qu’il faut accepter ce que l’on a perdu. Sœur Mindwell a renversé notre repas mais vos coups ne le feront pas revenir dans nos assiettes »
Azariah (Riposte) : «Quand on gère un village comme je le fais, on ne peut pas se permettre de se référer au livre de la Vie. »
Azariah (Raise) : « Sœur Mindwell aura appris une bonne leçon aujourd’hui. Elle cessera d’être maladroite demain, dit il en lui frappant les mains avec la crosse de son révolver. »

Lui n'est plus juste dans l'arène blabla. Les PJ peuvent défendre avec 2 dés et ne pas prendre de répercussions mais ils sont juste en train de voir la nana se faire broyer les doigts. Un autre argument "josephine ange gardien" de leur part et tu remontres avec ton PNJ comment ça se passe sur le terrain, avec mise en application pour illustrer ton argument. Tes PJ continuent de discuter ? ils continuent le conflit même si ils sont sûr de gagner l'enjeu à la fin ?

Je crois, et j'insiste sur le crois mais tu apportes toi-même plusieurs éléments confirmant cette pensée, que tu avais trop souvent en tête des scènes jouées avec Fabien et que tu as voulu reproduire. Sauf que les dés ne te permettaient pas de reproduire la scène comme tu l'avais vécu. Je perçois aujourd'hui dogs comme un jeu à narration partagée, entre le MJ, les PJ et les dés. Les PJ et le MJ ont plusieurs dés sous les yeux, même ceux de l'adversaire. C'est à eux de narrer le déroulement du conflit de manière à créer des choses sympas (dilemme etc...) à partir de ces dés. Dogs, c'est faire parler les dés (pas juste ça mais c'ets un élément important du jeu). Du coup, d'une partie à l'autre, avec le même village à jouer, tu auras une histoire différente (et encore plus si tu changes les personnages, et encore plus si tu changes les joueurs).
Ma conclusion à moi, c'est qu'aucun probabiliste ne peut prévoir le déroulement d'une partie de dogs. C'est justement pour ça que j'aime dogs.

Je me permet d'anticiper sur le conseil de fred qui tient en 3 mots (tu vois, je retiens la leçon !) : escalate, escalate, escalate !

Par contre, pour le 2 contre 1, soyons clair, ton PJ n'a aucune chance, sauf s'il est boosté (comprendre un possedé ou un sorcier, avec un tas d'équipement et des sbires à sa solde, dans ce cas, c'est plutôt le contraire, seul, un PJ n'a aucune chance). Là-dessus, je ne sais pas quoi dire de plus, j'ai eu le même problème avec dogs. A part se séparer rapidement parce qu'après le premier conflit, on voit comme on est au-dessus du lot, qu'on a le droit de perdre un enjeu de toute façon, et qu'il a plein de trucs à faire dans le village en même temps si on ne veut pas que ça parte en couille trop vite.

Pour finir, d'une manière générale, nous sommes arrivés au constat que quand un conflit avait été inintéressant ou qu'il y avait eu un problème, c'était pas parce qu'on avait mal joué ou mal maitrisé, c'était parce qu'on avait mal choisi l'enjeu. Si l'enjeu est le bon, le conflit sera intéressant (même s'il faut pour cela que ça se fasse en conflit suivi). Donc mon conseil, c'est de bien réfléchir au moment de définir l'enjeu et après, l'immersion viendra naturellement durant le conflit (même si il y a des silences et des calculs comme le dit romaric pour prosopopée, on reste immergé car on pense à la situation, on se met à la place de son perso, c'est donc de l'immersion). Donc en tant que MJ, tu n'es pas là pour raconter une histoire déjà écrite (ou déjà vécue avec Fabien), tu es là pour prendre du plaisir aussi (pas sûr que Fabien ait plannifié les scènes qui t'avaient tant plu).
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Re: [DitV] La faute aux dés ?

Message par Fabien | L'Alcyon » 10 Fév 2013, 18:17

Salut Steve,

Je vais remettre ici par écrit quelques unes des remarques que je t'ai faites mardi soir, ça permettra d'y réfléchir ensemble et je pense que ça sera également utile à d'autres lecteurs.

Pour commencer, Dogs in the Vineyard est un jeu complexe (et cette complexité se justifie par la puissance qu'elle parvient à créer). Par conséquent, comme un instrument de musique, il faut apprendre à en jouer pour bien en profiter. Donc ne te décourages pas tout de suite, ça viendra après un ou deux essais.

Comme tu l'as fait, dans une partie one-shot, pousser les joueurs à prendre des relations avec les membres du village; cela rend les conflits tout de suite plus intenses.

Pour les initiations, tu n'as pas la possibilité d'escalader, donc il ne faut pas hésiter à sauter à la gorge des personnages et proposer immédiatement des situations explosives, contenant des dilemmes, en construisant sur ce que le joueur veut pour son personnage.

Toujours pour les initiations, n'oublie pas que lorsque le joueur veut faire changer quelque chose d'intérieur à son personnage (habitude, sentiment, croyance), le meneur joue le changement et le joueur joue la résistance du personnage (voir p.29 2b); ainsi la question débattue dans le conflit est: qu'est-ce que ça coûte au personnage de changer ses habitudes.

Au cours des conflits, n'oublie pas que tu peux faire appel à la violence de différentes manières:
  • d'abord en escaladant, c'est-à-dire en recourant à la violence physique ou en tirant sur l'autre pour impliquer de nouvelles caractéristiques et les dés qui vont avec ; c'est sans doute le plus direct et le plus efficace, mais c'est aussi le moyen le moins subtil
  • pour nuancer un peu, tu peux utiliser les armes des PNJs (donc obtenir les dés qui leurs correspondent) sans nécessairement tirer directement: un personnage peut sortir son pistolet pour rappeler son autorité ou pour menacer l'autre
  • enfin, même si tu as déjà mis en oeuvre toutes tes caractéristiques, même si tu as déjà utilisé les armes, tu peux toujours tirer sur les PJs; pourquoi ? parce qu'à ce moment-là, les personnages prennent des retombées en d10, donc potentiellement mortelles (comme tu l'as expérimenté)
Tout ceci permet d'éviter que les discussions ne durent trop en longueur: on est au far-west ! quand les arguments ne marchent plus, laissons parler les flingues !

Enfin, quel que soit la manière dont les PJs règlent les problèmes, si le village est bien fait il y a toujours des conséquences déplaisantes ou des personnes pas contentes. En tant que meneur, il ne faut pas hésiter à mettre les joueurs devant les conséquences des actes de leurs personnages.
Elijah et Hester ne peuvent pas être mariés ? Ils s'enfuiront dans la forêt pour tenter d'y élever leur enfant.
Elijah et Hester sont mariés ? Les gens du village reprocheront aux Dogs d'avoir accompli des rites interdits relevant de la sorcellerie.
Les Dogs convainquent par la force Azariah d'arrêter de battre sa femme ? Celle-ci prendra sa défense (parce qu'elle l'aime malgré tout).
Les Doges ne parviennent pas à convaincre Azariah ? Il fera mal à sa femme au point de lui casser un bras, voire de l'handicaper définitivement.
Les actions des Dogs ont toujours des conséquences fâcheuses si le village est bien fait.
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Re: [DitV] La faute aux dés ?

Message par Christoph » 18 Fév 2013, 23:02

Hello Steve

C'est avec plaisir que j'ai lu ton rapport. Je pense que ce que les deux autres gus t'ont dit est de bon conseil, je vais juste ajouter quelques suggestions à certains points que tu as soulevés. Pour référence, j'utilise le pdf de l'édition 2005 de DitV et cette aide de jeu inofficielle traduite par mes propres soins (si jamais il se glisse un terme qui te semble suspect).

Ce passage m'a interpellé :
Steve a écrit :Une remarque quand même, le système de résolution est très présent. Mes joueurs passent pas mal de temps à optimiser les dés utilisés dans leurs relances. Cet aspect tactique les sort de la fiction. Ils soulèvent un problème que j’avais déjà remarqué lors de ma partie avec Fabien (c'est bien la seule critique que j'aurai pu formuler vis à vis du système) : il arrive qu’un joueur enchaine une réplique à une attaque de l’adversaire et une attaque. Exemple :
Dog (Raise) : «Frère Azariah, la parabole de Jacob dans le livre de la Vie nous montre qu’il faut accepter ce que l’on a perdu. Sœur Mindwell a renversé notre repas mais vos coups ne le feront pas revenir dans nos assiettes »
Azariah (Riposte) : «Quand on gère un village comme je le fais, on ne peut pas se permettre de se référer au livre de la Vie. »
Azariah (Raise) : « Sœur Mindwell aura appris une bonne leçon aujourd’hui. Elle cessera d’être maladroite demain. »

Ici le joueur aimerait intervenir entre les deux dernières répliques de Frère Azariah et répondre à l’objection sur le livre de la Vie. Le système l’en empêche…

Il est tout à fait vrai que les règles structurent la parole, c'est même quelque part ce qu'on leur demande. Donc, il est effectivement impossible d'intervenir entre la riposte et la relance : à chacun d'attendre son tour. Pourtant, il n'est pas impossible d'intervenir sur les répliques de Frère Azariah. Il peut être utile de décomposer chaque relance comme étant une action que l'on décomposerait en Exécution et Effet (souvent implicite). L'idée d'une riposte est de mitiger l'Effet. Quand on renvoie le coup (un dé), l'Effet est carrément retourné sur l'envoyeur. Quand on bloque ou esquive, on se protège de l'Effet, quand on accuse le coup, on se prend l'Effet (on ne sait juste pas quelles seront exactement les conséquences, c'est-à-dire les retombées). L'Exécution, elle, a toujours lieu. Frère Azariah semble d'après ce que tu écris avoir bloqué l'Effet : il ne se sent nullement concerné par la notion de devoir accepter ce que l'on a perdu. Ceci doit être respecté, sinon on tourne on rond. En revanche, rien n'empêche de revenir à la charge selon un autre angle.

Admettons donc ces trois répliques, voici une suggestion de riposte pour un Dog :
Dog (Riposte) : « Frapper son épouse ne constitue en aucun cas une leçon. »
Dog (Relance) : « Vous me semblez de plus en plus suspect. La violence physique, et le rejet des enseignements du Livre de la Vie. Êtes-vous seulement un véritable fidèle ? »
ou
Dog (Relance alternative) : « De plus, vous semblez vous placer au-dessus du Livre de la Vie. Je vous accuse publiquement de blasphème ! »

Les règles n'empêchent donc pas de tenir les personnages responsables de ce qu'ils disent. Et même, c'est en revenant à ce qui a été dit qu'on peut le plus espérer qu'un adversaire se couche (dont l'utilité technique est, si on se couche au lieu de riposter, qu'il annule l'Effet de la relance même si on n'a pas les dés pour). C'est un autre petit facteur qui mitige l'importance des dés. Au sujet des dés-même, je t'accorde que ça demande un moment d'habituation, mais je prétends que les règles de conflit peuvent devenir un véritable canal de communication non-verbal : un simple « Non. » ou « Il l'ignore superbement. » (comme riposte) sur un ton glacial accompagné de deux gros dés devient un moment très fort, alors que dans un autre jeu on se sentirait peu légitime de faire ça, on devrait « la jouer plus roleplay ».

Quant au fait que c'était une partie ratée, je te trouve un peu rude avec toi-même. En tout cas la manière dont tu l'as rapportée, il y a plusieurs choses très amusantes, notamment la fin avec la mort subite d'un des Dogs ! C'est là qu'il serait intéressant de jouer une deuxième partie, tu créerais un village qui joue fortement sur l'usage des armes à feu, et vous verrez bien si l'approche pacifiste du Dog survivant persiste...

Dans ta première note de bas de page (hmm, drôle d'expression en l'occurrence), tu dis que ta copine a été agacée par la position sociale des femmes dans l'univers du jeu, donnant comme exemple qu'une femme Dog ne pouvait espérer qu'un meilleur mariage. La position des femmes dans cet univers est évidemment problématique, surtout pour des joueuses je suppose et je comprends le choix de ton amie. Il peut être intéressant de jouer sur des personnages ou des villages qui tentent de chambouler l'ordre patriarcal établi, et rendre des jugements égalitaristes très en avance sur leur temps (l'univers n'étant pas le nôtre, raison de plus de se moquer d'une quelconque vraisemblance historique).
Innommable: hurlez.
Zombie Cinema, en français dans le texte.
Christoph
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Re: [DitV] La faute aux dés ?

Message par Steve J » 20 Fév 2013, 15:13

Merci Christoph pour ta réponse, je trouve très convainquant (comme je trouvais très convainquant les messages de Fabien et de shiryu) ton approche de la communication dans les conflits. Je pense cependant qu'avec ma copine il y avait un problème de goût : elle trouve envahissante la présente des règles dans la conversation et la nécessité de faire des choix tactiques relativement décorrélés des choix du personnage. Il y a là une divergence que je pense profonde et je ne pense pas retenter le jeu avec elle (c'est toujours décevant d'abandonner un jeu que l'on aime mais je trouve ça préférable à forcer des jeux que les joueurs trouvent pénibles à ma table).
Je reviens d'ailleurs sur l'aspect tactique, il me semble que si le mécanisme de conflits de Dogs étaient présent dans un jeu de société je passerai beaucoup plus de temps à optimiser mes actions. Une fois en jeu je préférai ne réfléchir que superficiellement aux implications numériques de mes choix tactiques. Cependant je comprends bien que certains joueurs se prennent aux jeux de l'optimisation et que cela les amène à séparer l'aspect technique des règles de conflits de ce qui se passe dans la fiction.

J'aime bien aussi ton approche des problématiques du jeu, et cette idée qu'il n'y a pas à craindre l’anachronisme et rendant des jugements progressistes. Je pense le dire aux joueurs lors de ma prochaine partie.

Pour la qualité de la partie, je ne pense pas être si dur que cela avec moi même. Je ne pense pas qu'il y ait grand chose à changer dans ma façon de jouer pour arriver à une partie de Dogs satisfaisante. Cependant, autour de la table, l'ambiance était à l'ennui. Les conflits trainaient en longueur, les joueurs avaient la politesse de ne pas trop râler mais leur ennui était palpable. La mort finale fut d'ailleurs vécut comme la cerise pourrie sur un gâteau rassi et amena plus de "pffff" que de rires...
Mon second joueur est cependant prêt à recommencer l'expérience (ne serait-ce que parce qu'il attribut une grande partie de l'échec de cette partie aux jets de dés).
Steve J
 
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Re: [DitV] La faute aux dés ?

Message par Christoph » 22 Fév 2013, 21:37

Hello Steve

Effectivement, si ça passe pas, ça ne vaut pas le coup d'insister, loin de moi la prétention que ce jeu doit plaire à tout le monde .

Il y a juste un point sur lequel j'aimerais insister, c'est cette idée qu'on peut découpler fiction et règles. Elle me laisse perplexe à chaque fois que je l'entends. À moins qu'on n'ait vraiment rien à cirer de la partie (et j'admets que vu le contexte d'ennui généralisé autour de la table, c'était peut-être le cas sans que ce ne soit la faute à personne), c'est pas possible « d'optimiser » le conflit sans référence à la fiction. Tiens, rien que pour te donner mes exemples de ripostes, j'ai dû relire soigneusement les répliques citées. En effet, si je relance avec des tirs de revolver, on ne peut pas, dans la majorité des cas, décemment riposter avec des alléluia (sauf si vraiment on est parti sur du décalé), ça n'a juste aucun sens. Et mon personnage passerait pour un monstre s'il tirait sur des gens qui le supplient à genou de leur accorder sa clémence.

Le plus important peut-être, c'est cette notion de pouvoir se coucher. Pour savoir si ça vaut la peine de s'accrocher aux enjeux du conflit ou s'il vaut mieux se coucher, il faut précisément savoir ce que l'autre joueur a dit. En fait, si on joue juste aux dés, le jeu devient complètement absurde, et ce serait un peu de la mauvaise foi de dire que le système vient empêcher l'immersion/roleplay/ambiance (biffer ce qui ne convient pas). Les règles sont très claires que ce qui constitue une relance, c'est à la fois la description et les dés (pas juste l'un ou l'autre), et j'espère que mes exemples ici et dans le message précédent aident à comprendre pourquoi. Ça n'a pas la même signification de dire « Je le défie de venir me le dire en face. » avec deux 10 ou avec deux 1 ; dans le premier cas l'adversaire va être enclin à abandonner (parce que le personnage qui le dit est en position de force dans la fiction), dans le premier cas, l'adversaire va plutôt pousser (on a décelé son insécurité). C'est une manière très subtile d'accorder son interprétation des personnages, qui dans le « free form » peut allégrement tendre vers l'exagération et l'insistance par fautes de médiation objective.

Cependant, ce n'est pas l'instrument le plus simple à maîtriser, et comme un gosse qui apprend à jouer du violon... ça peut laisser « perplexe » les premières fois !
Innommable: hurlez.
Zombie Cinema, en français dans le texte.
Christoph
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