[D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

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[D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Lioda » 21 Nov 2011, 22:22

Bonjour à tous.

Depuis quelques mois, j'ai commencé une énorme campagne de D&D où je voulais tester de nouvelles idées pour changer mes habitudes de roliste. Depuis, j'ai fait quelques recherches et j'ai découvert ce site où les gens tentent des aussi des expériences très intéressantes...
Du coup, je me propose de partager avec vous quelques retours sur mes parties (peut être qu'un podcast récent sur un autre site m'a donné envie de cette démarche...)

Pour commencer, je vais rapidement me présenter. Dans la vraie vie, je suis un informaticien d'une trentaine d'années, et je joue à des jeux de rôles depuis à peu près... toujours.
Cet été, avec mon groupe de joueurs, on en a eu marre de la répétition que l'on vivait dans le jeu de rôle en général et avec nos MJ habituels. Donc j'ai décidé de redevenir MJ comme il y a très longtemps et de mettre en pratique quelques idées qui m'étaient venues.

Pourquoi avoir choisi D&D ? Pour deux raisons :
1) j'avais les règles et je les connaissais déjà. J'ai conservé ma vieille boite rouge (et oui, quand je dis D&D c'est pas AD&D)
2) de mon point de vue c'était un système simple, pas trop intrusif (il ne règle quasiment que le problème du combat) et qui permettait quand même de créer un univers riche.
J'y ai tout de même apporté quelques modifications : pas de magie parmi les PJ (je voulais la réserver en tant que force incompréhensible, façon Pendragon, il me semble) et un univers personnel (mélangeant dark fantasy à la façon de la Tour Sombre, steampunk et intrigues politiques)
J'ai donc eu un Guerrier (joué par une joueuse de sexe féminin), un Nain et un Voleur. La base de la fantasy, très bien.

Les différents points que je voulais tester :
  • une implication des personnages dans leurs action : pas de quêtes "facteur" ou "trésors au fond du donjon". Les PJ doivent avoir un intérêt personnel dans tous ce qu'ils entreprennent
  • une énorme dimension sociale et narrative : toute action des PJ doit avoir un impact sur le monde, même les plus anodine des phrases peut avoir de l'importance (sans tomber dans le travers inverse, non plus, ça reste un jeu). Bon depuis j'ai appris que ça s'appelle le narrativisme, mais j'en savais rien à l'époque...
  • une dimension philosophique (ou plutôt psychanalytique) : essayer de rendre une partie de l'ambiance des voyages d'Elric de Melnibonée en JDR (c'est un point que je n'ai pas encore trop eu l'occasion de fouiller, mais la découverte d'un certain Sens me laisse croire que c'est possible)
  • créer un vraie histoire telle qu'on aimerait en lire (nous = mon groupe de joueur et moi) : pas juste des aventures bières-chips (comme on dit), mais bien quelque chose de construit, de réfléchi, où l'on prend du plaisir à découvrir les nouveaux chapitres
Je ne vais pas pouvoir détailler précisément le scénario, car au final, ce n'est pas le plus intéressant, et il me faudrait plus de place. Par contre, je vais essayer de synthétiser des points précis qui ont amené certaines interactions entre PJ / PNJ.


Les PJ ont commencé en se réveillant dans un endroit inconnu et non familier, sans aucun souvenir de leur arrivée. Le but était une implication personnelle dans l'aventure (rentrer chez eux, savoir où ils sont, pourquoi ils sont là...), et surtout un démarrage très rapide, avec une construction petit à petit du caractère et du background des persos (dans D&D rien de tout cela ne fait partie du système...).
Les premières créatures qu'ils ont rencontré leur ont révélé leur nature d'Aryat (terme inventé pour l'occasion dérivant du sanskrit Arhat) : des gens choisis par les Immortels pour accomplir une mission.
Pour accentuer encore le côté implication personnel, ils ont rapidement "trouvé" un médaillon maudit que le Guerrier a mis autour de son cou et ne peut plus enlever.
De même, j'ai plusieurs PNJ féminins qui se sont mis à tenter de séduire certains de mes PJ, pour rajouter à l'intensité dramatique. Mais ces scènes ce sont souvent assez mal terminées : mes PJ ne sont pas tous de bons roleplayers, et surtout de me voir en train de draguer un de mes amis était pour le moins caustique et le côté théâtral n'a pas gommé toute le décalage humoristique de la scène...
Je me demande s'il est possible de faire vivre des histoires d'amour entre des PJ / PNJ de façon réaliste ?

Après cette arrivée mouvementée, ils ont découvert que le monde (ou du moins cette partie du monde) est le siège de beaucoup d'intrigues politiques : un duc aux idées progressistes mais qui cachent des choses et surtout qui a "volé" la terre de son duché à des clans nomades. Ceux-ci, sont l'autre force en présence, tentant des actions terroristes variées pour récupérer leurs terres, en même temps qu'ils cherchent les ruines d'une cité enfouie. Mais ils ont des "agents" infiltrés au sein du gouvernement du Duché et sont assistés d'un informateur très haut placé...
L'un de mes moments préférés a justement été lorsqu'ils ont découvert qui était le traître : depuis plusieurs séances, ils avaient différents indices qui pointaient vers la duchesse en personne. Il était intéressant de voir les joueurs débattre pour savoir si oui ou non elle était vraiment coupable. Malgré tous les indices, le guerrier, pragmatique, ne voulait accuser personne, il confiait une partie de ses doutes (avec les indices) au duc, pour laisser celui-ci prendre les décisions. J'ai donc rajouté tout un côté dramatique avec le duc devenant méfiant envers sa femme, celle-ci usant de ses charmes pour essayer de rallier les PJ de son côté...
Le climax fut lorsqu'ils ont réellement eu la preuve de sa culpabilité : tous les joueurs ont éclaté autour de la table pour crier des "j'en étais sûr !" ou l'insulter. C'est ce genre de moments forts (où il y a symbiose entre les émotions du joueur et du personnage) que j'ai satisfaction à vivre.

Par contre ce que je regrette, à ce niveau précis, c'est que les joueurs ont suivi automatiquement la voie du Duc. Pour différentes raisons (bonnes ou mauvaises) ils n'ont pas cherché à comprendre si les motivations du camp d'en face avait plus de légitimité ou pas. C'est un peu dommage, mais je pense que c'est un peu dû à l'habitude des joueurs de penser que ce qu'on leur présente est vrai ; et beaucoup de ma faute, qui les ai mis dans des situations où les autres étaient des ennemis avec lesquels ils n'ont pas cherché à discuter, mais à se battre.
J'ai des regrets à ce niveau-là, de ne pas avoir pu plus jouer des épisodes mettant en scène le trouble de chacun des camps (rien n'est manichéen), etc. Je ne sais pas si vous avez déjà pu avoir ce genre de cas dans vos parties ? Si oui, comment réussir à faire chercher profondément les joueurs à comprendre le camp adverse plutôt que de juste les voir comme des ennemis ?

En revanche, j'ai vécu beaucoup de scènes très plaisantes où mes joueurs étaient désorientés, sans savoir à qui se confier (ça les rend très créatifs) et surtout je modifiais en permanence l'univers et les réaction des PNJ à leur encontre en fonction de ce qu'ils faisaient. Quelques exemple :
  • le Voleur a crocheté une serrure devant le duc, sans réfléchir... du coup celui-ci lui a confié une mission d'espionnage et d'enquête dans une partie suivante en rappelant l'évènement
  • à force de voir des espions partout, j'en ai rajouté juste assez pour qu'ils ne se croient pas paranoïaques, ce qui a donné lieu à quelques scènes d'interrogatoires plus ou moins discrets qui ont vexé quelques PNJ innocents
  • j'ai réussi à caser une boucle temporelle : le médaillon que porte l'un des PJ est n fait créé par un magicien dans le passé, mais c'est parce qu'il a vu celui que portait le PJ qui a voyagé dans le temps. J'avais très peur pour cette séquence que le PJ ne montre jamais le médaillon (il le cache, conscient de son pouvoir occulte assez mal vu par la population), mais ca c'est très bien passé et c'est une de mes moments les plus forts en émotion. Du coup le PJ se sent responsable de tout ce qui arrive dans le monde
  • les actions des PJ ont amené la séparation du couple ducal, le sauvetage d'un PNJ manipulé par le camp ennemi, un voyage dans le temps, des découvertes scientifiques... je ne prépare mon scénario que d'une fois sur l'autre car je rebondis toujours sur leurs actions et mes histoires sont résumés à quelques évènements à placer et des psychologies de PNJ, aucune trame linéaire

Au fur et à mesure des parties, je me suis aperçu qu'un point que j'ai beaucoup de mal à "arbitrer" et que j'essaie donc de limiter, ce sont les interactions de roleplay juste entre mes joueurs, sans aucun PNJ. Souvent si les conversations commencent bien, l'un des PJ finit toujours par dire une phrase que l'autre joueur prend pour lui (et non pas pour son personnage). Chacun essaie alors d'expliquer en quoi il est logique que son PJ agisse de la sorte, expliquant ses motivations, plutôt que de les interpréter. Je pense que ça vient aussi de mes joueurs (qui font trop de jeu vidéo et pas assez de JDR...) mais je me dis qu'il doit exister des moyens (peut-être à intégrer dans le système du jeu) pour maintenir le rythme théâtral des scènes.

Une dernière question que je me pose, c'est que j'adore faire intervenir pleins de petits PNJ pour donner de l'épaisseur au monde : soldats, commerçants, passants, prêtres, etc. : tout ce que je peux générer en improvisation pour répondre aux situations créées par mes PJ et qui ne sont pas initialement prévus, mais qui donne une forte impression de réalité.
Et pour moi, c'est toujours difficile de trouver des noms... ça casse le rythme à chaque fois. Avez-vous des tables de noms prêts à l'emploi ? un générateur ?

Je me pose toutes ces questions, car les expérimentations que j'aie tentées et que je compte encore apporter avec cette campagne sont le terreau d'une réflexion vers la création d'un jeu de rôle plus personnel (dont je reparlerai dans une partie du forum plus tard). D'où ma présence sur ce forum, pour regarder ce qui se fait ailleurs et les innovations que la communauté apportent en ce moment.


PS : j'espère que mon message n'est pas trop long (ni trop plein de fautes), merci à ceux qui liront jusqu'au bout !
Lioda
 
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Re: [D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Frédéric » 22 Nov 2011, 00:09

Bonjour Lioda, bienvenue !
Par soucis de convivialité, on a pris l'habitude de demander aux nouveaux inscrits s'ils sont ok pour nous donner leur véritable prénom, mais ce n'est pas une obligation, on respecte toute volonté d'anonymat.

Très intéressant compte-rendu de partie,
concernant l'histoire d'amour entre PJ et PNJ, pour ma part j'ai à mon actif pas mal d'histoires et de scènes de relations amoureuses dans mes parties de JDR (mais je crois que Fabien et Christoph me battent à plates coutures). ^^

Je te conseille de jeter un œil à ces quelques rapports de partie où la relation amoureuse/sexuelle est centrale :
- Breaking the ice, un jeu centré sur la naissance d'une relation amoureuse viewtopic.php?f=19&t=2514
- S/lay w/me, une histoire de quête, de combat contre une créature et de relation de séduction avec une "amante" viewtopic.php?f=19&t=2363
- Bliss stage propose une place importante aux relations (amitié, amour, rivalité etc.) viewtopic.php?f=19&t=2527
Reste à voir ce que tu entends par "de façon réaliste"...

Concernant la question du "comment fait-on pour faire de l'anti-manichéen ?"
De mon côté, je fais quelque chose de très simple : les évènements et révélations importantes sont indépendantes des actes des PJ, ainsi, j'ai toute liberté de les intégrer quand le moment me semble opportun. Ça signifie éviter de prévoir ce que les joueurs doivent faire pour y arriver, voire même de les soumettre à épreuve : quoi qu'il arrive, les joueurs auront tous les éléments importants de la trame.
Par exemple, tu peux trouver des exemples dans ces rapports de partie :
- Innommable, rapport de playtest intitulé "Transsubstantiation" : http://www.silentdrift.net/innommable/ tu pourras trouver la situation mystérieuse du même nom ici : http://www.silentdrift.net/innommable/
- Rônin, voici deux exemples de parties que j'ai jouées, les situations décrites le sont vers le début de chaque fil : viewtopic.php?f=3&t=2477 et viewtopic.php?f=3&t=2507
En utilisant cette technique, on sait qu'à la fin de la partie, les joueurs auront eu toutes les clefs pour comprendre l'histoire et donc ça aide à éviter de passer à côté de révélations importantes. Ensuite, pour Rônin, je crée la situation en indiquant un "avilissement" (donc un fait grave), je désigne les victimes et les bourreaux, puis je définis ce qu'ils veulent faire sur plusieurs étapes, des événements, éventuellement. De cette manière, je peux raconter l'histoire de chacun, entrer dans les détails et ensuite, j'imagine des "complications" : les choses ne sont pas aussi simples qu'elles le semblaient, la victime a ses torts, le bourreau a de bonnes raisons etc. Généralement, j'essaye de faire en sorte que chaque indice ou événement crée des enjeux auxquels sont confrontés les joueurs aussi, pour éviter de leur donenr l'impression de les tromper, je donne les "complications" bien avant la fin de la partie. J'espère que je suis dans le sujet qui t'intéresse.


Concernant les conflits entre joueurs, j'utilise généralement une mécanique de résolution similaire à celle que j'utilise avec les PNJ, car en général je gère les conflits même verbaux, dès lors que l'enjeu en vaut la peine, avec une mécanique "formelle". Je comprendrais que ça ne t'intéresse pas, ce n'est pas quelque chose de très répandu, mais en fait, ça a un avantage principal : dans une partie où les prises de décisions peuvent être controversées (si les ennemis n'en sont pas vraiment etc.), il est possible que les joueurs soient en désaccord. Si on les laisse tout régler par la parole, il est tout à fait possible, pour ne pas dire récurrent, que les joueurs campent sur leurs positions et que la situation soit grippée. Parfois, pour abréger, l'un d'eux va jeter l'éponge pour continuer la partie (et non pas parce que la situation lui semble l'exiger, ce qui me semble vraiment dommage). Utiliser une mécanique de résolution (généralement, j'utilise la même pour les combats que pour les autres types de conflits) aide à éviter les débordements à condition qu'ils produisent du sens (enfin, ça demanderait un sujet en soi, cette question). :)


Pour les noms, je ne connais que deux solutions : soit j'ai une liste de noms dans laquelle je pioche sans sourciller, soit je décris le personnage et je l'appelle "le forgeron", "le duc" etc. Dès lors que la partie ne consiste pas à une enquête minutieuse où chaque détail peut être un indice, ce n'est pas censé déranger les joueurs de ne pas avoir le nom d'un personnage (après tout, dans un roman, les personnages secondaires ne sont pas souvent nommés).


Enfin, pour la longueur du sujet, je trouve que tu as très bien synthétisé et il n'y a aucun problème à écrire des pavés.
Et pour l'orthographe, c'est tout à fait correct.



Si tu veux développer n'importe lequel de ces points plus en détail, n'hésite pas.
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Re: [D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Footbridge » 22 Nov 2011, 11:15

Bienvenue sur ce forum Lioda !

Bon rapport de partie, vous avez l'air de vous être bien amusé sur cette campagne !

C'est vrai que le système de D&D n'est pas forcément le plus adéquat pour gérer les conflits et enjeux sociaux (ce qui pourrait t'intéresser dans le cas de tes discussions PJ vs PJ). Ca demande effectivement de prendre un certain recul par rapport au roleplay mais cela permet en général de faire avancer l'histoire d'une façon relativement intéressante et fertile pour l'imagination. Peut être que tu peux essayer, dans le système D&D (faudrait que je retrouve ma boîte rouge pour m'y replonger) de greffer un système de gestion du social.

Sur le côté "je veux mettre un dilemme moral" avec l'ennemi, effectivement tu n'as peut être pas assez présenté les conséquences des actes des PJ, dans un sens comme dans l'autre. Pour que naisse le dilemme moral, il faut que les joueurs aient les éléments à disposition et surtout que les éléments sur lesquels tu veux que les personnages réagissent fassent écho à une sensibilité du joueur et non pas du personnage. Donc, si tu connais bien tes joueurs, c'est du pain béni, parce que tu sauras un peu mieux sur quelles ficelles tirer pour les faire réagir en tant que joueur (et ils insuffleront cela à leur personnage très naturellement ensuite). Autre option, donner des objectifs ou des croyances aux personnages et faire en sorte qu'un ou deux personnages aient des chances de s'intéresser un peu plus aux manigances de l'ennemi pour se mettre à douter. C'est sûr que si on ne voit les orcs que comme de la chair à canon, les pjs auront peu de chance de se poser des questions. Par contre si on découvre que les orcs en fait, suivent une noble cause (plus noble que celles des dirigeants humains) alors les nuances de gris apparaissent.
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Re: [D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Lioda » 22 Nov 2011, 22:35

Merci de vos réponses. Je me suis présenté, apparemment :)
En fait je m'appelle Lionel... mais il me semble qu'il y en a déjà un sur le forum, d'où l'utilisation de mon surnom habituel :)

En lisant vos réponses et les rapports de parties quant aux relations sociales (PJ/PJ et PJ/PNJ), j'ai l'impression que vous utilisez le système du jeu pour modéliser cet aspect là.
J'avoue que j'ai tendance à ne vouloir le considérer que du point de vue roleplay. Or mes joueurs n'ayant jamais toujours la même humeur, leurs interprétations sont aléatoires.
Inversement, j'ai peur qu'en quantifiant les relations par des termes de jeu, je me retrouve dans une situation où mes joueurs ne vont plus être créatifs, mais uniquement suivre ce qui est écrit sur leur fiche de perso et que moi je finisse par utiliser ça pour les forcer à réagir "correctement" (par exemple si un PJ n'agit pas de manière logique par rapport à ce qu'il devrait faire).

Ce que je voulais dire par créer des situations "réaliste", c'était d'éviter de tomber dans des clichés et / ou des situations surjouées (dans la mièvrerie ou au contraire dans l'explicite, ça peut vite s'emballer quand on a 4 geeks autour d'une table, mâles ou femelles...).
J'avoue ne jamais avoir réfléchi à tout ça auparavant, même Animonde n'était pas aussi développé sur le sujet :)
... malgré mes longues années en MJ et joueur, je n'ai quasiment fait que du mainstream...

En tout cas, j'ai apprécié le rapport de partie sur Bliss Stage. C'est très intéressant justement sur le côté social, surtout de voir comment celui-ci est un ressort obligatoire (permet d'être meilleur en mission, etc).
J'ai toujours une appréhension à avoir des statistiques chiffrés et/ou des rapports notés sur les fiches de personnages, ça finit trop en jeu vidéo. de plus, faire tout entrer dans le système, finit par restreindre les actions à une vision (celle de l'auteur) et l'on ne peut pas en sortir. C'est d'ailleurs la réfléxion d'un intervenant sur la partie de BtI : viewtopic.php?f=19&t=2514#p20345

Je pense que c'est véritablement le coeur du questionnement "qu'est-ce que je modélise dans mon système, qu'est-ce que je laisse ouvert à l'interprétation des joueurs (MJ compris)". Et c'est depuis toujours ma grande interrogation...


Pour ce qui est de l'implication des PJ, en lisant les rapports de partie sur Ronin, je vois effectivement que je n'ai pas correctement préparé mes parties (je n'aime pas dire scénario qui donne un sens trop dirigiste). Je voulais laisser la possibilité aux joueurs de choisir leur camp, mais je ne leur ai pas assez donné la possibilité de comprendre leurs adversaires. Je m'aperçois de toutes les occasions ratées... tant pis, je me rattraperai sur la suite de ma campagne qui va faire intervenir de nouveaux groupes de PNJ.

Intégrer l'objectif du personnage en tant qu'élément du système, c'est à la fois une bonne idée (approfondissement du personnage, etc.) mais à double tranchant (exactement comme le problème des relations sociales) : trop d'informations sur la feuille, me donne une impression de rigidité, donc intéressant sur du one shot pour l'immersion, mais dommage sur le long terme d'une campagne prévue pour plusieurs mois (dans tous les cas, il faut un moyen de faire évoluer ce but en fonction des évènements).

Mais ça peut être sympa de rajouter de tels éléments pour créer du dilemme moral (les exemples de Ronin avec les principes de Loyauté / Pitié m'ont donné à réfléchir). Et il faut bien avouer que le système d'alignement de D&D (avec juste Loyal, Neutre, Chaotique, je ne joue pas avec le grand frère AD&D) ne sert juste à rien :)

Ce que je cherche à faire, dans tous les cas, c'est d'éviter d'avancer avec des histoires de type mission (ordre, rétribution, châtiment, etc.), mais d'avancer parce que les personnages veulent obtenir quelque chose, pas juste se laisser porter par l'histoire (surtout que mes joueurs n'ont pas tous la même volonté quant à la création artistique :) ).
J'ai aussi lu un rapport de partie de Démiurges qui a fortement intégré ce principe de manière très intéressante.

Mais je reste toujours sur la défensive, trop de choses dans le Système finit par créer un univers trop mathématique...

[On est entre passionnés : je donne ici mon point de vue sur ces choses-là, ce ne sont pas des critiques, juste des réflexions adaptées à mon style de jeu et / ou mon groupe de joueurs. Je suis totalement ouvert à la discussion, d'où l'existence de ce post. Je préfère préciser au cas où mon style paraîtrait un peu sec :) ]
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Re: [D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Frédéric » 23 Nov 2011, 01:58

Salut Lionel (ah, j'ai pas retrouvé le post où tu te présentais, pas grave, en fait, il y en avait déjà deux de Lionel ^^), content de voir que ça te donne matière à réfléchir.

Surtout, j'aimerais préciser que l'éventail est très large entre un jeu vraiment spécialisé comme Breaking The Ice et un jeu bien plus large comme beaucoup de jeux "mainstream", ou même comme Le Pool (voir plus bas) et que personne ici ne te demandera d'adopter une manière de penser et de faire des jeux.
Donc, excuse moi d'insister, mais comme les questions que tu te poses me ramènent à tout cela, je me permets de développer les points abordés :

Pour le côté mathématique, dans un jeu comme Démiurges ou Rônin, il faut comprendre que côté joueur, en dehors d'un effort supplémentaire demandé d'un point de vue créativité, il n'y a pas autant de calcul que dans D&D. En revanche, les mécaniques sont un peu plus présentes que dans le système BaSIC, par exemple car elles aident à construire l'histoire au pied levé et par rapport à un simple jet sur 100 qui ne fait rien d'autre que dire : action ratée, action réussie, il faut quelque chose d'un peu plus complexe (mais pas nécessairement compliqué) pour permettre d'impacter véritablement l'histoire tout en exploitant la créativité des joueurs. Les joueurs ont plus de boulot d'un poitn de vue créatif, mais de manière surprenante, ça tend à les responsabiliser.
Enfin, les chiffres sont en fait très sommaires et n'impliquent que des rapports de cause à effet. Innommable n'a pas de fiche (juste un nom, un "rôle" et une "attache" : ce à quoi tient le plus le personnage, donc aucun chiffre), dans Breaking the ice, il n'y a que des mots ou de courtes phrases. Les joueurs doivent juste faire la différence entre donner un dé, relancer des dés et piocher trois dés. On est très loin des calculs que l'on peut voir sur des fiches de jeux mainstream (j'ai été joueur à Rolemaster, je sais de quoi je parle) :D
Il y a aussi Polaris que tu connais apparemment, qui n'utilise que des phrases clef. (J'ai une réserve sur l'utilisation trop facile du "only if" qui conduit vraiment à faire du grand n'importe quoi si l'on ne fixe pas une limite d'utilisation, mais en dehors de cela, c'est un jeu formidable).

Je ne souscris pas à l'idée que moins on utilise de mécanique plus on se centre sur l'histoire. C'est vrai si les mécaniques sont trop exigeantes pour les participants et si elles ne cherchent qu'à simuler la réalité, plutôt qu'essayer de dynamiser l'histoire. Prenons l'exemple du système Le Pool, c'est ultra léger, tu peux jouer à peu près ce que tu veux et il dynamise vraiment l'histoire (et à part choisir le nombre de dés que l'on lance, il ne demande aucun calcul). Il est tout à fait adapté pour aborder des parties où les choix moraux sont centraux et où l'histoire est créée en temps réel (à condition de développer une manière adéquate de préparer les situations, mais ça, c'est déjà bien avancé dans les messages précédents). :)
Il permet de donner des orientations imprévues à l'histoire, il donne du contrôle aux joueurs sans que ce soit excessif, il permet aux joueurs de se poser la question : "qu'est-ce qui est important pour moi" grâce à la réserve de dés, il permet de définir les conséquences des actes à l'issue des conflits et de partager ça avec les joueurs, plutôt que de laisser tout le temps le meneur décider, (le système de récupération des dés n'est pas optimal, mais c'est facile à arranger) et il empêche les joueurs de se sentir floués par le MJ, dès lors qu'il est utilisé de manière transparente. Et pour cela, il n'utilise pas beaucoup voire quasiment pas de chiffres, ce qui en fait le fonctionnement réside surtout dans le fait de lancer plus ou moins de dés, dans le monologue de fin et dans l'énonciation du but d'un Conflit. (fin de la page publicitaire).
Les Traits utilisés dans Démiurges par exemple ne sont pas un comportement à suivre, les joueurs ont un contrôle et une liberté totales sur la conscience de leurs personnages. Les Traits ne sont que ce qui ressort dans les situations de crise. C'est une explication qui se trouve dans le texte du jeu (peut être pas dans les anciens). Il suffit d'être clair là-dessus pour éviter que les joueurs ne le prennent pour une tablette de la loi. ^^
Car en effet, c'est cette liberté de conscience qui permet de rendre les choix de l'histoire "moraux" plutôt que "conformes au canon" (par ex : "un nain ça n'a pas peur").


Ensuite, sur le côté "spécialisé des jeux dont on parle là, ce n'est en fait qu'une autre spécialisation : les jeux mainstream sont également spécialisés, souvent dans les enquêtes et épopées ; bien qu'ils permettent de jouer souvent le personnage que l'on veut, le métier que l'on veut (quitte à ce qu'il serve à rien, bon, c'est pas dans tous les jeux, mais c'est rare que tous servent vraiment), on peut agir comme on veut (a priori), quitter la quête proposée si ça nous chante, choisir les compétences que l'on veut, mais en réalité tout cela favorise généralement des parties tournées vers l'enquête et l'action ou la célébration d'un univers, pas sur la dramaturgie (qui est souvent laissée entre les mains du MJ, voire ficelée avant la partie). Comme l'impression de liberté est très grande, elle paraît plus naturelle que dans un jeu avec des mécaniques plus ciblées, mais en réalité ce n'est pas évident du tout (je ne parle pas de ta manière de jouer, mais du présupposé des systèmes mainstream) et bien sûr, comme tu as déjà dû le comprendre, le scénario du MJ est la plus grande contrainte que peut subir un joueur en réalité. Les systèmes des jeux sus-cités balisent, mettent en avant les éléments importants du système, mais offrent de très grands espaces de libertés et de créativité aux participants.

Les mécaniques un peu plus développées servent à aider dans l'exercice de l'impro et le fait que les jeux soient recentrés sur des thématiques sert à renforcer l'expérience recherchée : plus un jeu resserre son sujet, plus on peut penser que l'on va aborder l'expérience d'une manière entière, précise et forte (si de bonnes conditions générales sont réunies comme dans tout activité).
Par exemple, dans Breaking the Ice, si l'on essaie de jouer une romance du même type dans un jeu où l'on doit combattre des ennemis parallèlement, la romance sera moins développée et souvent on s'arrêtera moins dessus que si c'est le sujet du jeu. Bliss Stage mélange très bien les deux, mais pour y parvenir, il est encore plus formalisé sur le déroulement des scènes. Le tout est de faire des choix, on ne peut pas tout avoir dans un même jeu. Encore une fois, ce "cadrage" de sujet n'est pas une nécessité (voir Le Pool). Notamment concernant les "objectifs intimistes" : c'est au joueur de les porter généralement. Si c'est le MJ qui les impose, ça semble souvent forcé. Dans Démiurges, tout ce qui est intime est choisi par les joueurs, et en dehors d'une relation avec un PNJ, il ne leur est pas imposé de faire de l'intime, ils peuvent rester dans l'héroïque à 100% si c'est ce qu'ils veulent.

En ce qui me concerne, j'ai pris le parti de développer autant de jeux que j'ai d'envies de parties quitte à en changer régulièrement plutôt que de passer tout mon temps sur un seul jeu qui peut tout faire, mais ça n'engage que moi. Je pense néanmoins que, comme me l'a dit un ami, "quand tout est possible, rien n'est vraiment intéressant" (et je pense au vu de ton approche que tu es très loin de ça).

De toutes façons, les joueurs ne sont pas bridés dans leurs actions. Par exemple dans Démiurges, ils peuvent aussi bien entreprendre un voyage que jouer une campagne à huis clos. Il peuvent dézinguer des gens à tour de bras ou tenter d'être le plus diplomates, on peut décider d'être des parias, des savants fous, des apprentis sorciers, ou des justiciers, des monstres, des fascistes, des anges gardiens, des libérateurs, des guides etc. Et chaque PJ peut se distinguer des autres, il y a justement une grande liberté de ce point de vue là. Qui me paraît même plus grande que beaucoup de parties plus "classiques" où on est libres, mais en fait, dès qu’on sort des clous, ça nuit à la qualité de la partie. Soit le joueur qui le faisait s'ennuyait, soit il ennuyait les autres.
Donc pour permettr eune vraie et grande liberté d'action et de choix aux joueurs, j'ai resserré un peu le jeu sur la structure des scènes et sur la préparation des parties. Cela permet de faciliter l'impro et de la rendre plus constructive pour la partie.
Et concernant le point sur l'objectif du personnage, je pense que le fait que le joueur le choisisse lui-même règle en soi le problème de la rigidité (dès lors qu'il est d'accord pour jouer comme ça, sinon, il faut choisir un autre jeu). Et comme son objectif peut être affecté par ses conflits contre les PNJ ou même les PJ et être modifié fondamentalement, voire être abandonné, ce n'est au fond pas si rigide que ça. Surtout que les joueurs ne sont pas obligés de se lancer perpétuellement à la poursuite de leur objectif, ils peuvent très bien jouer des scènes qui n'ont rien à voir, j'ai eu des scènes relationnelles ou amoureuses entre un PJ et un PNJ, alors que ça n'avait pas un grand rapport avec l'objectif (et ça s'intégrait très bien à l'histoire). L'objectif évolue, mais surtout, la partie peut continuer une fois qu'il est résolu.


Par rapport à ton projet de jeu, et surtout la question de savoir ce que tu dois modéliser dans ton système, mon point de vue (et je tiens à cela : c'est mon point de vue, qui n'est pas partagé par tout le monde ici), c'est que les pratiques des uns ne conviennent pas aux jeux des autres : j'ai déjà vu des jeux avec de bons univers, de bonnes idées, menés par de bons MJ, donner des parties minables parce que tout était laissé à l'appréciation du MJ et que son habitude ne convenait absolument pas au fonctionnement du jeu, de la façon dont le scénar était foutu, par exemple, du statut des personnages, de la manière dont les actions se résolvaient etc. Mon but en faisant en sorte que le jeu soit cadré est de permettre aux futurs MJ de ne pas pouvoir foirer leurs parties à ce point.
Si ton jeu restait partagé entre toi et tes amis, la question se poserait différemment, mais dans l'optique de le publier, ça me paraît une bonne déontologie. :)
Et il suffit de pas grand chose pour cadrer un jeu correctement, pas besoin d'aller aussi loin que les jeux cités plus haut : il faut juste empêcher les MJ de le transformer facilement en du PMT ou en jeu d'enquête si ce n'est pas ce pour quoi tu l'as créé.

Bref, mon but n'est pas tant de te vendre ma came que d'essayer de préciser mon point de vue sur les questions que tu soulèves. ;)
Si tu veux avoir vraiment de la matière pour répondre à tes questions, je te conseille de jouer à l'un de ces jeux (Rônin et Démiurges sont en développement, ce n'est pas les meilleurs pour commencer). Le Pool avec les conseils de préparation peut être une bonne tentative, sinon, tu peux trouver Innommable ici, la version 007 est un peu plus efficace que la version 008 à mon avis, mais les deux tournent très bien (mais le jeu n'est pas franchement orienté vers les questions morales). Sinon, tu peux voir du côté des jeux anglophones, il y a de quoi faire avec des expériences vraiment très différentes, voir : http://theunstore.com/index.php/unstore/browse/recent ou http://www.tao-games.com/
Et c'est justement cette diversité qui fait la richesse de ces partis pris.

Après, tu pourras vraiment te décider pour savoir à quel point tu voudras formaliser ou non ton jeu.
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Re: [D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Frédéric » 23 Nov 2011, 02:26

J'oubliais, il y a aussi des jeux plus "classiques" qui proposent de jouer narrativiste avec une structure bien plus traditionnelle, comme Hero wars mais il me semble que le système de résolution est très important...
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Re: [D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Lioda » 23 Nov 2011, 22:25

Merci beaucoup de tes réponses.

J'ai en plus trouvé un thread sur les joueurs paresseux : viewtopic.php?f=19&t=2143 qui me rappelle un peu ce que je vis par moment. Je me sens vraiment moins seul avec mes problématiques :)

Je pense que tu as raison, si je laisse trop de liberté et trop de possibilités, tout devient possible, et du coup, sûrement que les PJ ne voudront rien faire car ils seront sans but dans un monde trop vaste. Je n'avais jamais songé à cela.
J'aime bien la base décrite pour Ronin où une action entreprise réussi forcément, ça permet de tout faire... et parfois c'est à double tranchant :)
De même, je pense que quantifier un minimum les relations entre mes PJ et mes PNJ, pour ne plus reposer que sur la simple interprétation du joueur (qui varie selon son état de fatigue et ses souvenirs de la partie précédente) va améliorer toute la dimension sociale, donnant de l'épaisseur aux PJ. Si j'arrive à trouver un ressort du système pour les forcer à avoir un minimum de raisons de chercher le contact social (bon ou mauvais, d'ailleurs, l'important étant de s'investir), je pense que ça peut être intéressant (un peu comme le fait Bliss Stage, mais en le mettant certainement moins au coeur du système).

Je vais donc commencer à tenter des modifications subtiles (pour commencer...) du système pour rajouter ce que je trouve qui fait défaut pour donner plus de responsabilités aux joueurs, améliorer la dimension sociale, etc. Petit à petit, en améliorant par itération, je pense finir par obtenir un système plus satisfaisant et plus responsabilisant, donc demandant plus de créativité de la part de tous. Le tout c'est de rester fluide (je suis du genre à repousser au maximum les situations qui nécessitent un jet de dé, ça peut tellement casser le rythme parfois !)

Je me souviens que l'on avait essayé Wushu et ça ne s'était pas très bien passé, on avait du mal à utiliser le système très narratif, trop différent de nos habitudes. Maintenant, je pense que je comprends mieux (merci les rapports de partie divers et variés que je lis ici depuis quelques semaines...) donc j'espère éviter nos erreurs passées...

En tout cas j'ai commencé à sonder mes joueurs sur leurs attentes quant à ce qu'ils attendent du jeu, j'ai enfin pu cristalliser mes idées et comprendre mieux la théorie (même s'il me reste encore beaucoup à découvrir et à tester). Je crois que c'est très important de ne pas brusquer les joueurs, et je veux vraiment les impliquer dans l'histoire.
Après c'est vrai que j'ai encore de vieux réflexes et j'ai du mal à me dire que je peux laisser (même infinitésimalement) les rênes de mes PNJ à mes PJ.
Je prévois qu'ils puissent avoir une grande influence sur l'environnement, par contre vu que je crée des histoires à mystères, les PNJ ont parfois des motivations cachées dont les PJ ne voient que la surface (à moins de poser les bonnes questions, et j'ai une joueuse qui pose toujours les bonnes questions...). Du coup j'ai peur que cela crée des incohérences dans certains caractères (j'ai moi aussi beaucoup à apprendre sur la manière de jouer :) )
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Re: [D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Frédéric » 23 Nov 2011, 23:03

Content de voir que ça te parle. :)

N'hésite pas à nous poster de nouveaux comptes rendus de parties pour nous faire part de ton projet et de son évolution, de tes questionnements etc. Ça m'intéresse beaucoup.
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Re: [D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Lioda » 23 Nov 2011, 23:19

Oui, peut-être une dernière question. Comment faire, si je laisse à certains moments la possibilité à mes PJ de narrer des évènements concernant mes PNJ, pour qu'ils ne détruisent pas certains ressorts du scénario ? Et par scénario j'entends surtout ne pas empêcher des évènements / moments importants dans l'histoire.

Un exemple : dernièrement, mes PJ se sont retrouvés (avec leur Duc) à tenter de parlementer avec un des leaders ennemis. Ce leader était ensorcelé (la duchesse possède des pouvoirs occultes) et du coup, il voulait, contre toute rationalité, ouvrir les hostilités. Si jamais un PJ croit qu'il s'agit de la manière de penser de toute l'armée ennemie et qu'à ce moment le système lui permette d'être le narrateur et fait attaquer toute l'armée... je me retrouvais à devoir gérer un massacre organisé (oui, je ne craignais pas trop pour mes PJ et le Duc, ce dernier est créé pour être invincible... mais mes pauvres barbares auraient été annihilés, ce qui aurait gêné à plusieurs niveaux, et particulièrement un PJ). Et je n'ai pas trop envie de transformer mes histoires en boucheries génocidaires... (au contraire le but de toute l'histoire était d'arriver à un traité de paix, plus moral et plus intéressant... bien sûr, si l'inverse s'était produit pour de bonnes raisons quant aux actions de mes PJ, j'aurais laissé faire, mais une simple erreur d'interprétation dans la narration n'est pas, d'après moi, une bonne raison)

Donc j'avoue que c'est le genre de moment où je ne voudrais surtout pas perdre le droit d'être un MJ contrôlant tous les PNJ...

Ça doit paraître une question évidente quand on déjà fait des jeux dans ce goût-là, mais j'avoue que je suis un peu débutant en la matière :)

PS : j'espère que mon exemple est clair... je suis bien meilleur en MJ qu'à synthétiser les histoires... enfin j'espère pour mes joueurs :)
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Re: [D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Fabien | L'Alcyon » 24 Nov 2011, 00:24

Salut Lionel ! Bienvenu et merci de ton rapport de partie où vous vous êtes apparemment vraiment bien éclatés !

Bon, j'arrive un peu tard sur cette discussion pourtant très riche, Fred a une fois de plus frappé avec rapidité et exhaustivité. J'ai quand même un ou deux ajouts complémentaires à faire.

Concernant la question des relations amoureuses en jeu de rôle, j'avais fait une « revue de littérature » pour un projet de jdr, sur le thème « intimité et sexualité ». Fred est trop modeste de ne pas parler de son jeu Les Cordes Sensibles avec lequel j'ai déjà joué des histoires d'amour compliquées et poignantes (mais peut-être, Fred, as-tu tes raisons que j'ignore ?). Je rajoute également It Was a Mutual Decision de Ron Edwards, dans lequel on joue l'histoire d'un couple qui se sépare de manière assez glauque, que j'ai pu lire récemment et dont j'aimerais faire un rapport de partie si l'occasion se présente. Si tu veux creuser le sujet, il y a sans doute de bonnes idées dans ces jeux.
Concernant la sincérité des relations humaines et amoureuses, j'ai deux réflexions personnelles à ajouter à l'idée de Fred qu'il faut que les joueurs amènent eux-mêmes les éléments intimes. D'abord, je crois qu'il faut que tous les joueurs en aient (vraiment) envie et soient à l'aise avec l'idée de jouer ensemble des relations amoureuses: la déconnade ou la caricature sont parfois des moyens d'échapper à une situation d'intimité trop forte, où on se sent mal (et c'est tout à fait compréhensible). Ensuite, j'ai le sentiment que parler d'intimité sincèrement suppose que tout le monde autour de la table s'y mette ; c'est comme - toutes proportions gardées - se mettre nu : c'est plus facile si tout le monde le fait que si une seule personne le fait face à un groupe.
Maintenant tout ceci n'est que mon expérience personnelle, à toi de voir ce que tu veux en faire, avec tes envies et tes joueurs.

Sur la question que tu soulèves, « qu'est-ce que je modélise, qu'est-ce que je laisse à l'appréciation des joueurs et du meneur ? », je crois que ça dépend de l'objectif de ton jeu. Si ça n'est pas important (comme une scène de combat dans Breaking the Ice), je crois que tu peux laisser ça aux joueurs et au meneur, parce qu'il n'est pas nécessaire de s'y attarder et on n'a pas particulièrement besoin de structurer l'imagination des participants pour arriver à quelque chose de bien. En revanche, si c'est essentiel pour ton jeu (la séduction dans Breaking the Ice, donc), alors il faut que tes règles en parlent pour aider les participants à inventer au pied-lever (surtout les joueurs qui, contrairement au meneur, ne préparent rien) et les guider efficacement. A ce moment-là, les règles peuvent aider à définir un espace de créativité pour ce qui est important (pour continuer sur ma lancée : si on se séduit c'est entre qui et qui ? qu'est-ce qui nous plaît dans l'autre ? pourquoi ça peut marcher/ne pas marcher ? comment on parle de choses douloureuses ? etc.).
Plus largement, j'ai le sentiment (mais une fois encore ça n'est que mon opinion) que la vision de l'auteur est toujours présente dans un jdr. Les règles attirent l'attention sur un élément de la fiction (le combat à D&D, la séduction à Breaking the Ice) et « disent » quelque chose sur les histoires que l'auteur veut que les joueurs racontent (par exemple dans Sens, très clairement, l'absence de dé indique que les joueurs ne contrôlent en fait que la Volonté de leur personnage et que le reste de l'univers est déterminé par le meneur de jeu). J'ai aussi le sentiment que c'est une bonne chose: ça permet à l'auteur du jeu de s'exprimer et de transmettre aux participants du jeu une vision du monde ou d'une question précise, de la même manière qu'un auteur de livre ou de film peut le faire.

Voilà, j'espère que tout ceci peut t'aider dans ta réflexion et pour ta campagne !

Moi aussi, ton projet m'intéresse, je suivrai tes prochains rapports de partie avec plaisir !
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Re: [D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Kco Quidam (Julien Gobin) » 24 Nov 2011, 00:29

Bonjour à toi !

Je suis le dialogue (même si je ne répond pas, Fred exprime mieux les choses que je ne le pourrais).

Cependant je pense pouvoir te donner une tactique pour ton problème : vu qu'il semble que tes joueurs sont au courant de ton envie d'évoluer vers des jeux un peu différent tu peut très bien dialoguer avec eux durant la partie au cas ou quelque hose bloque.

Dans l'exemple que tu cite par exemple, tu peut très bien exprimer à la fin ta gène. Ca coupe la naration certes mais ça permet de rester en accord, exemple improvisé :

Joueur : "Yeah je gagne le droit de narrer. Bon alors là l'armée attaque les barbares et ... "
MJ : "Arf, désolé de te couper mais ça me gène pour la suite j'ai vraiment pas prévu ça"
Joueur : "Mince ça bloque pourquoi ?"
MJ : "Bah j'ai plutôt axé le scénar sur le fait de chercher à résoudre le problème sans violence, du coup si on finit comme ça on passe à côté de plein de truc. Ca te dérange pas de reprendre ?"

Et voilà ! Les jeux de rôles "classiques" on tendance à nous faire oublier le fait que l'on peut très bien discuter de la fiction entre joueurs (le mj est un joueur) durant la partie pour s'assurer que tous le monde prenne son pied sur ce qui est joué. Si tu veux tester rapidement ce principe d'écoute/discussion je te conseille de faire jouer (selon le nombre 3-4 participants ça tourne bien) une partie rapide de Prosopopée de Fred, la partie peut durer 30 minute et ça "dépucelle" bien je trouve. Je te conseille d'ailleurs de présenter la partie de Prosop' (si tu en fait une) comme ça a tes joueurs : "On teste pour voir ce que ça donne d'avoir une narration super partagée".

Pareil un autre conseil que je te donne c'est d'expliciter clairement à tes joueurs le but de l'histoire au début. Dans ton cas ton but était clairement de "pousser tes joueurs à trouver une solution pacifique au problème" alors dit leur "le but du scénario c'est de trouver une solution pacifique au problème". Comme ça pas d'ambiguïté possible, tes joueurs peuvent se concentrer sur le truc et ils ne sont pas prit au dépourvu. Le problème serait le même si tu voulais faire un scénario où le but est de tataner sévèrement du nécromancien, si les joueurs ne sont pas prévenu il se peut qu'il cherchent à "négocier" et si l'hstoire n'est clairement pas prévue pour ça ne pourra que clasher.

Après il y a d'autres techniques de préparation qui permettent de s'assurer (ou du moins d'éviter très fortement) que la liberté du joueur et le scénario ne rentre en conflit, par exemple ne décrire qu'un "bac a sable" (les pnjs et les relations qu'ils entretiennent entre eux mais pas ce qui va se passer durant le scénar), je recherche les liens qui en parle mais tu peut jeter un oeil du côté de Innommable , Bienvenue à Poudlard et Démiurge (Les deux derniers ne sont pas des jeux finit mais ils illustrent plutôt bien ce principe de scénario par caneva). Je te laisse lire les liens là dessus si ça t’intéresse.
Dernière édition par Kco Quidam (Julien Gobin) le 25 Nov 2011, 03:02, édité 1 fois.
Kco Quidam (Julien Gobin)
 
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Re: [D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Frédéric » 24 Nov 2011, 01:27

Innommable non plus n'est pas fini (mais il tourne sacrément bien et les explications du texte sont claires).
(Et le coup du dépucelage m'a bien fait rire). ^^

Pour répondre à ta dernière question, c'est assez délicat.
Pour résumer, il y a 4 "Responsabilités" :
- Contenu : qui choisit ce qui compose l'univers, qui sont les PNJ, quelle est leur histoire etc.
- Révélation : qui choisit quand et comment révéler le contenu.
- Résolution : qui raconte l'issue des actions ou des conflits.
- Situation : qui décide de la manière dont les PJ et le contexte sont mis en relation.

Fondamentalement, la préparation de la partie et la créativité des joueurs peuvent coexister si elles ne se parasitent pas. Si par exemple le MJ a préparé un univers dans les moindres détails, c'est extrêmement risqué de laisser les joueurs être entreprenant sur le contenu.
Si le MJ a prévu une intrigue à l'avance, c'est délicat de laisser les joueurs intervenir sur les révélations, etc.
Cependant, aucune de ses responsabilités n'est entièrement dévolue à un participant, un exemple classique :
- Contenu : le MJ a le contrôle du monde, mais les PJ décident de ce qui compose leurs domiciles et leur équipement.
- Révélation : un jeu comme Inspectres laisse les joueurs décider des révélations de l'histoire. Mais sans aller aussi loin, imaginons que chaque PJ ait un secret, le fait de choisir quand et/ou comment le révéler serait une responsabilité de révélation.
- Résolution : Le joueur raconte ses victoires, le MJ raconte les échecs (généralement, le joueur ne peut pas raconter plus que le résultat effectif des actions entreprises et du but du conflit, ce qui évite d'influencer d'autres aspects de la fiction).
- Situation : le MJ brosse le décor, les joueurs expliquent comment ils interviennent...

La grande question, c'est, comment donner de la liberté aux joueurs sans gêner la préparation du MJ ?
Il faut faire en sorte que la préparation du MJ soit incomplète, qu'elle ait des trous, puis donner aux joueurs des mécaniques ou des consignes claires sur ce qu'ils ont le droit ou pas de créer ; de manière générale, bien sûr ; dire : toi tu as le droit de décrire les fleurs et toi les cailloux, c'est limité.
De plus, spontanément, la plupart des MJ laissent les joueurs décrire leurs habits, leur équipement, l'apparence de leur personnage etc. alors que ça fait partie du monde.

Si tu t'intéresses à ces questions, voici quelques articles de mon cru (et là je cloue le bec à Fabien (Monostatos) à propos de mon humilité ^^) beaucoup inspiré des jeux et théories parues sur The Forge :
Responsabilités et propriétés

La volonté et le monde

À propos des mécaniques de résolution

Il y a beaucoup d'autres choses à dire, mais ça me semble cibler quelques interrogations principales de ton sujet qui est déjà bien chargé (on ne va pas faire le tour de la théorie et de la pratique ici, n'hésite pas à reprendre des points spécifiques et à ouvrir de nouveaux rapports de parties pour en discuter plutôt que d'encombrer un fil de mille questions). ^^
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Re: [D&D] Faire du neuf avec du (très) vieux

Message par Footbridge » 29 Nov 2011, 13:48

A nouveau, dans la situation que tu donnes, je pense que la notion de "Croyance" ou d'objectif de personnage peut être une réponse tout à fait appropriée (et qui comme tu le dis, va bcp plus loin que les simples alignements de D&D). Dans ton groupe il faudrait qu'un ou plusieurs personnages aient pour croyance 'résoudre le conflit sans la violence' ou un truc de ce style là. Comme cela dans la situation que tu évoques, le groupe se déchire et tu tombes en plein dilemme sur comment résoudre la situation.

Fais en sorte que le personnage (ou le joueur) le plus autoritaire soit celui qui ait une croyance de résoudre le conflit pacifiquement et le tour est joué.
Footbridge

La Bible du Meneur de Jeu & Le Blog des MJs : http://www.labibledumeneurdejeu.com
New Heaven, le jeu narratif post apocalyptique : http://www.newheaven.fr
Footbridge
 
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