[Prosopopée] Ma première partie

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[Prosopopée] Ma première partie

Message par shiryu » 02 Fév 2013, 22:47

Voici le premier de mes 3 posts sur Prosopopée. Il a pour but de faire le CR de ma première partie de Prosopopée, avec des joueurs que je cible comme n’ayant jamais joué à Prosopopée (ni fait de jdr à narration partagée).

Vous trouverez aussi : prosopopée, un jeu pour vieux ? et ma fiche critique de Prosopopée.

Nombre de joueurs : 3 (1 nuance : moi, 2 mediums : mes parents)
Durée : 2h (explication du jeu, création de perso, partie, bilan)

Explication du jeu :
« nous allons écrire une prosopopée. (lecture de la petite phrase pour expliquer). En gros, la marraine de cendrillon est une fée, pourquoi ? comment ? on n’en sait rien mais ça ne gêne personne. Dans porco rosso, un aviateur est transformé en cochon, c’est le seul sur terre et ça ne dérange personne. Ici c’est pareil, si on introduit un truc magique ou féérique, on n’aura pas besoin de l’expliquer ». j’ai tenté de raccrocher aux histoires qu’ils lisent à mon fils ou aux contes classiques.
Remarque qui tue de ma mère : là ça ne te gêne pas mais quand on dit que dieu existe, ça te gêne ? Réponse : non, la bible est un conte comme un autre. Et ici, on ne cherchera pas non plus à justifier le miracle par l’intervention de dieu.
« Notre histoire est unique, il n’y a pas de lieu nommé ni d’époque. Le petit poucet, on ne sait pas où c’est et ça ne change rien. Blanche neige est dans un royaume lointain, à une époque qui s’appelle « il était une fois ».
« Le conte va mettre en scène des problèmes que les humains ont à cause d’un déséquilibre avec la nature. 2 d’entre nous vont jouer un médium, c’est un humain qui s’est éveillé, il a pris conscience du déséquilibre, il dispose donc de certains pouvoirs pour rétablir l’équilibre. Le 3ème dira comment les choses évoluent en gros. »
Question qui tue : c’est quoi le mieux à jouer ? Réponse : peu importe, les 3 vont créer le conte. 2 le font à travers un personnage doué de pouvoir, le 3ème à travers les autres personnages.
J’ai lu ensuite les 3 règles, expliquer le don de dé quand on estime que l’autre dit des trucs intéressants sur lesquels on va pouvoir rebondir. Je n’ai par contre pas décrit le système de résolution de problème, je leur ai juste dit que quand un problème apparaîtra, je leur expliquerais (même si techniquement, eux aussi ont la possibilité de poser un dP, je m’attendais quand même à ce que ce soit moi qui le fasse en premier).
J’abrège ici, mais je pense ne rien avoir oublié dans l’explication que je leur ai donné (à part la résolution de problème). J’ai lourdement insisté sur le concept de narration partagée, ce qui est dit est dit (avec des exemples), du droit au silence, etc… Ca aura son importance ensuite.

La création de perso :
Je me doutais que le joueur qui connaissait le mieux le jeu se retrouve souvent à jouer une nuance, un peu le rôle de MJ, donc classiquement celui qui connait le jeu. Pourtant, il me semble que ce jeu est un peu à part, je suis donc resté très ouvert dans la description des rôles pour ne pas laisser sous-entendre que j’allais d’office endosser le rôle de la nuance. A vrai dire, je pensais même que ça pouvait être intéressant que l’un d’entre eux joue la nuance car il me semble que le guide pourrait être très efficace pour donner de l’impulsion à un groupe débutant. Je pensais aussi que l’un d’entre eux se proposerait pour être la nuance, je n’ai donc rien orienté dans la répartition des rôles. Toutefois, les 2 ont fait un medium.
La remarque qui tue de mon père : je fais un écolo. Réponse : tu n’es pas juste un écolo, tu es en lien avec la nature.
Celle qui porte bonheur comme le muguet (végétaux), Sensibilité 5, perception 4, sagesse 3
Celui qui se transforme en poussière, (élément), science 5, savoir-faire 4, perception 3

Le paradigme :
La proposition qui tue de mon père : une centrale nucléaire. Réponse : nous sommes dans un conte d’époque ancienne, ce n’est pas un conte moderne.
mon père propose « l’épée de rolland », je lui rappelle que notre histoire n’est liée à rien de connue, je garde juste « l’épée ».

Le départ de la quête :
j’ai pas mal hésité. J’ai senti que je devais m’éloigner de l’épée de rolland ou d’arthur sinon on était bon pour raconter la même histoire, mais je sentais aussi que je devais rester sur cette piste car ça semblait les inspirer. « Nous sommes en automne, l’épée doit être donnée au nouveau roi avant l’hivers mais elle a disparu ».

l’histoire : 1ère phase
les villageois ont caché l’épée car leur roi est méchant. Cette épée est magique, elle transforme en glace celui qui la porte. Sauf si le porteur porte un brin de muguet. L’eau de la rivière est gelée, ce qui empêche le moulin à eau du village de tourner et de moudre le grain. Celle qui porte bonheur organise une solution de secours avec d’anciennes meules et du bétail. Une meute de loups est attirée. Le roi tente de s’approprier toute la farine nouvellement fabriquée. Celui qui se transforme en poussière organise une rébellion et les villageois s’opposent au roi.
A partir de là, mes parents ont commencé à comprendre comment ils pouvaient résoudre les problèmes, comment on jouait, etc… Pour arriver à ce point de la partie, j’ai ramé ! (voir problèmes rencontrés plus bas). Nous avions alors comme problèmes (dans l’ordre où ils ont été écrits) :
Vide : le roi est méchant 3
Animaux : une meute de loups est attirée 4
Vide : les villages sont affamés 4


l’histoire : 2ème phase
les loups creusent à la recherche de l’épée. Le soleil est haut dans le ciel, la rivière fond. La rivière fond car les loups y ont trouvé l’épée et repartent avec. Les loups reviennent au village. Le roi ressort de sa maison mais refuse de combattre les loups. Les loups lui apportent l’épée, le roi porte un brin de muguet. Au moment où il soulève l’épée, celui qui tombe en poussière appel la foudre qui terrasse le roi (succès total). Il devient aussi celui qui donne la mort. Un villageois s’empare de l’épée pour combattre les loups. Il se transforme en glace. Celle qui porte bonheur rassemble les villageois pour faire fuir les loups, celui qui tombe en poussière et donne la mort l’aide en commandant aux vents d’agiter l’épée devant les loups (aide avec 1 dé, succès total). Elle devient celle qui fait fuir les loups. celui qui tombe en poussière et donne la mort utilise l’épée grâce aux vents pour aller chasser dans la forêt, Celle qui porte bonheur et fait fuir les loups les mène à la cueillette. celui qui tombe en poussière et donne la mort leur apprend à reconnaître les baies comestibles, un villageois se propose de suivre son enseignement afin de le transmettre ensuite aux autres villageois (j’aide d’un dé, succès total). Il devient celui qui donne la mort et la vie.

Bilan fait avec eux : je me concentre juste sur les éléments que j’attribue au fait que nous n’ayons jamais joué à prosopopée (et uniquement à cela).
Mon père dit avoir nagé complètement sur la première partie pour comprendre ce qu’on attendait de lui.
Ma mère dit n’avoir jamais envisagé d’écrire ou d’inventer une histoire. Quand elle a envie d’une histoire, elle lit un livre ou regarde un film. C’était nouveau pour elle.
La remarque qui tue de mon père : « pour moi, ce n’est pas un jeu ». ouch ! en plein dans mon actualité mais je pensais qu’il n’y avait que des clampins en manque pour se poser la question, pas que ça pouvait sortir de la bouche du premier venu. Je vais essayer de garder les termes employés (de mémoire) car j’ai titillé dans un des derniers podcasts de la cellule sur le sujet (et eu pas mal de MP avec Brand). « Ce n’était pas jouissif, ça demandait un effort ». « Avancer des pions dans des cases, ça nous suffit et c’est plus distrayant ». « dans un jeu, il faut un gagnant ».
Nous avons un peu débattu là-dessus (j’ai surtout comparé au scrabble qui est une de leur grande activité à la maison), voir l’autre post car je pense que ce n’est pas juste Prosopopée le problème.

Voilà, fin des 2 heures. Mon regard maintenant.
Dernière édition par shiryu le 07 Mars 2013, 22:04, édité 1 fois.
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Re: [Prosopopée] Ma première partie

Message par shiryu » 02 Fév 2013, 23:33

Problèmes rencontrés :

J’aborde tout de suite le problème dû à une mauvaise compréhension des règles de ma part. Il s’agit de l’utilisation des médiations. J’avais bien en tête que la valeur des médiations allait nous servir pour éliminer un problème, je les ai donc utilisées comme des remédiations. Or, dans les descriptifs et les exemples p 22-23, ce ne sont pas des moyens de remédiations mais des moyens de perception du problème, la résolution devenant ensuite évidente une fois que l’on a compris l’origine du problème. Du coup, nous avons joué un peu à l’envers. A savoir que les joueurs ont narré assez librement les origines des problèmes, et que nous avons utilisé les médiations comme des moyens d’action pour résoudre le problème au moment du jet de dé. Ca va paraître anodin pour certain mais ce fut du coup une réelle difficulté parfois pour trouver la médiation la plus adaptée, avec parfois une réinterprétation des médiations, comme par exemple : « utiliser la sensibilité pour influencer les émotions » et créer ainsi la peur chez les loups. Du coup, j’ai le sentiment d’être passé à côté de la difficulté que doivent ressentir les mediums, à savoir chercher l’origine des problèmes plutôt que les résoudre. Cette approche a certainement eu une influence sur d’autres problèmes (notamment le cluedo)

Le gain de dO : dans la première partie de l’histoire, j’ai trouvé mes parents assez créatifs. L’histoire était globalement intéressante et la narration plutôt dans l’ambiance du jeu. Par contre, j’étais bien le seul à donner des dés. Dans la deuxième partie de l’histoire, quand mes parents ont commencé à comprendre la mécanique du jeu, c’était plus une course à la résolution des problèmes. Les éléments narratifs apportés étaient toujours très concrets, beaucoup moins oniriques, à la recherche de l’efficacité. Il est intéressant de voir que dans ce même objectif, ils ont suivi chacun une démarche différente :
Mon père : dans le ludisme le plus pur ! Il s’est mis à prendre beaucoup plus la parole mais souvent pour dire des trucs débiles, attendant de recevoir un dO et souvent sans comprendre pourquoi on ne lui en donnait pas (après tout, on veut tous éliminer les problèmes alors donnons nous des dés !). Il s’est mis à en donner à tout va alors qu’il n’en avait pas donner un seul. Fait très révélateur, le premier dé qu’il a donné a été pour moi alors que ce n’est pas moi qui venait de parler (« ben oui mais tu n’en a pas encore ! »). Il a même voulu en donner 2 d’un coup, comprenant bien que c’était mieux d’en avoir plein en prétextant « mais je trouve ça très intéressant alors je peux en donner 2, non ? ». Bref, il aurait pu donner 10 dés d’un coup et faire un jet dans la foulée pour éliminer tous les problèmes en 1 minute, il aurait eu un grand sentiment de satisfaction pour avoir « gagner » la partie.
Ma mère : elle n’a toujours pas donné de dés dans la deuxième partie. Mais sa narration a changé. Elle ne cherchait plus à construire une histoire mais à donner des éléments très concrets pour résoudre les problèmes, espérant gagner un dé pour chaque étape franchie dans la résolution du problème, elle était dans une démarche de logique (je décris ça, il se passe ça, ça permet de faire ça, etc… jusqu’à « et du coup le problème est résolu » puisqu’elle aura trouvé 5 étapes pour gagner les 5 dés nécessaires à son jet.
J’ai le sentiment qu’une deuxième partie pourrait être très très rapide, du genre dès qu’un problème est posé, on le résous et hop, c’est fini.

La couleur choisie au départ est beaucoup moins importante que ce que j’ai laissé faire (mais déjà qu’ils galéraient à jouer leur médium alors j’ai laissé faire). Par exemple mon père a choisi la couleur éléments et à jouer comme si il contrôlait tous les éléments. Ensuite, il a choisi un attribut étrange en lien avec la couleur et ne l’a jamais mis en scène. De même que ma mère a choisi la couleur végétaux et trouvait normal qu’elle connaisse les plantes comestibles alors qu’il s’agissait pour moi d’un savoir-faire. En fait, la couleur ne sert à rien, si ce n’est définir un cadre pour trouver un attribut étrange.

Mon père a joué au cluedo. A chaque nouvel élément, il avait en tête ou exprimait la fin logique que ça prendrait, allant parfois jusqu’à décrire plusieurs jours, voir plusieurs mois plus tard :
- « l’épée transforme en glace, comme ça avec mes éléments, je pourrais retransformer le roi »
- « ben si ton villageois prend l’épée, il va se transformer en glace »
- « bah c’est simple ! les villageois vont retrouver l’épée comme ça ils chasseront les loups et tueront le roi. Du coup, il ne pourra plus leur prendre la farine et avec les meules, ils ne seront plus affamés. »
- « Puisque le roi ne veut plus tout prendre pour lui, ils vont replanter du blé, l’épée a le pouvoir aussi de creuser la terre, du coup ils peuvent cultiver et au printemps, ils font la moisson et ne sont plus affamés »
- « ils se révoltent contre le roi qui veut prendre toute la farine, le guillotinent, ils organisent un vote et forment des partis. »
Je pense que plein d'autres joueurs peuvent tomber dans ce travers. Si vos joueurs ne sont pas habitués à de la narration partagée, je pense qu'il ne faut pas hésiter à commencer avec une partie plus courte. Dès le départ, fixer qu'il y aura 2 dP, un problème à 3 et un problème à 4 (si vous avez d'autres expériences de partie initiatique, je suis preneur du nombre de dP et de la valeur que vous avez utilisés). Je pense aussi que j'aurais dû commencer par un dixit ou un il était une fois (à force d'entendre Romaric les confondre, je ne sais plus lequel fait quoi ^^).

Le plus gros problème, ça a été l’entrée en scène des mediums. Si je n’étais pas intervenu plusieurs fois pour leur souffler des idées en modifiant leur narration, ils seraient encore en train de raconter l’histoire des villageois. C’est ce que j’ai appelé « ramer » dans la première phase pour leur faire comprendre. Dans la deuxième phase, un simple rappel suffisait pour qu’ils se corrigent.
- « les villageois s’opposent au roi »
- « les villageois vont chercher des meules qu’ils font tourner avec le bétail »
- « les villageois s’organisent faire des groupes pour empêcher les loups d’entrer dans le village »
- « les villageois vont chasser dans la forêt pour se nourrir »
- Et d’ailleurs, ça a commencé par « les villageois ont caché l’épée ».
Or pour résoudre un problème, il faut faire un jet, et pour faire un jet, il faut que le medium fasse quelque chose.

Je note aussi qu'ils n’ont pas joué avec leurs médiations. Ma mère a proposé beaucoup d’idées en lien avec les sciences ou des savoir faire.

Ces deux points ne sont en fait que des conséquences de leur plus gros problème: ils ont eu du mal à incarner un personnage . Toutefois, la cause est sans doute dû au choix des joueurs (voir autre post: un jeu pour vieux ?). Le seul lien que je peux faire avec le simple fait qu'ils n'aient jamais joué à Prosopopée (et que donc d'autres joueurs qui s'initieraient à ce jeu pourraient faire la même erreur), c'est que les Mediums jouent prioritairement leur médium mais ne joue pas que leur médium. Etant donné que le Guide ici a joué la nuance, il a décrit en premier le village et les 2 autres joueurs l'ont copié. S'ils n'avaient pas eu cette liberté dès le départ, ils auraient forcément dû investir davantage leur personnage. J'ai réfléchi un peu à ça mais il ne faut surtout pas changer la règle, c'est au guilde d'aider les autres joueurs et aux joueurs d'investir un peu leur personnage, après tout, ils l'ont créé selon leur vision (et parce que je ne peux pas tout me mettre sur le dos non plus vu comme j'ai été insistant sur ce point durant toute la partie).


Enfin, le non-dit : Quand ma mère a dit que l’épée était cachée, pour elle, les villageois l’avaient enterrée, donc elle a tiqué quand les loups ont sorti l’épée de l’eau (« ben non, elle était enterrée »). Pareil pour les loups qui étaient attirés. Il n’a jamais été dit qu’ils attaquaient. J’avoue avoir volontairement chercher à m’engouffrer dans les non-dits, pour leur montrer qu’on pouvait être créatif en exploitant les idées des autres.

Bilan personnel :

Le rôle du guide : Sur un autre groupe débutant, je ferai un medium. Cela aide à la création et à toutes les spécificités du medium que la nuance ne fait pas (entrer en jeu, donner les dés, utiliser la nuance…)
Le joueur du medium peut jouer les villageois mais cette liberté les a perdu. A refaire, je limiterai le pouvoir narratif du joueur medium pour se limiter à son personnage et aux villageois qui l’accompagne. S'il décrit des choses qui ne touche pas son personnage (le soleil brille fort), j'insisterais pour au moins que ça soit à travers son personnage (je vois le soleil haut dans le ciel, il inonde l'air d'une douce chaleur).

Quand mon père a dit avoir nagé sur ce qui était attendu de lui, j’ai eu l’impression d’avoir un joueur de jdr traditionnel qui va passer les 3 pages de description de l’elfe pour juste retenir le bonus que ça accorde (je peux en parler, c’est ce que je faisais). Ainsi, toute la description du jeu que j’ai faite au départ, n’étant pas associée à une mécanique, a tout simplement été balayée par mon père. Du coup, j’aurais une toute autre approche la prochaine fois pour un groupe débutant, parce que les règles sont très bien faites. En effet, la mécanique sert les intentions du jeu. Le jeu pourrait très bien se passer du « comment on joue » puisque le système va amener à cette attitude de jeu.
Donc plutôt que de lire les intentions en premier, et que les joueurs pensent en attendant « c’est bien beau tout ça mais c’est abstrait. Concrètement, comment ça marche ? », je dirai :
- Il va y avoir des problèmes, et hop, on fixe tout de suite le nombre et la difficulté des problèmes en fonction de la durée que l’on programme. N’importe qui pourra mettre en scène un problème mais c’est forcément un autre joueur qui validera la scène comme un problème intéressant en plaçant un des dés sur le cercle. Les problèmes sont forcément dû à un déséquilibre entre les humains et la nature (il y a une phrase dans le livre qui dit cela bien mieux).
- Des médiums seront présents dans l’histoire pour découvrir l’origine des problèmes car les humains seuls ne voient que le problème, pas son origine. Les médiums sont des humains qui ont pris conscience de la véritable nature des choses, ils sont là pour rétablit un équilibre dans l’ordre naturel. Il faut X medium, qui joue un médium ? hop, je donne la fiche. Les autres jouent des nuances, c’est-à-dire qu’ils décrivent le décor et les actions des personnages secondaires.
- Pour découvrir l’origine des problèmes, les médiums vont utiliser leurs médiations. Hop, description et répartition des scores.
- Pour découvrir l’origine du problème, il faudra lancer des dés. Hop, explication de comment on gagne des dés, comment on en donne, comment les autres peuvent vous aider (du coup, si les dés des autres peuvent vous aider, ça incite à leur en donner, sinon chacun pense pour sa pomme à vouloir gagner ses propres dés pour son propre jet). Et là, c’est magique, il n’a pas à baratiner une heure pour dire qu’il faut apporter des éléments à l’histoire, si tu ne racontes rien, tu ne gagnes pas de dés.
- Enfin, j’ai bien dit que les médiums étaient des humains éveillés, touchés par l’Ordre naturel. Ils disposent donc d’un attribut étrange. Hop, rédaction des attributs mis en lien avec les couleurs.
Et une fois qu'on a tout ça en tête, je pose l'ambiance et les intentions (qui seront claires et évidentes pour les autres joueurs puisqu'ils ont compris la mécanique).
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Re: [Prosopopée] Ma première partie

Message par Thomas Munier » 03 Fév 2013, 12:51

C'est vraiment très intéressant ! Tu te prépare une methode de briefing pour une prochaine partie. Pense-tu que tu retenteras de faire du Prosopopée avec tes parents ? Est-ce un problème si ce jeu propose un amusement via la création plutôt que via le divertissement ou le défi ludique ?

Je me demande si à plusieurs reprises tu ne parais pas regretter que tes parents jouent d'une façon qui ne te semble pas canonique de Prosopopée.

Ainsi, tu refuse la centrale nucléaire comme objet de la prosopopée. N'aurait-il pas été possible d'adapter en imaginant une histoire autour d'une industrie archaïque destinée à produire de l'énergie et qui a un impact sur l'environnement ? (un barrage, une mine, une maison alchimique...). De même tu refuses l'épée de Rolland en déviant vers l'épée excalibur qui n'est pas du tout le même mythe, et même l'épée tout court.

De même je me demande si tu ne sanctionne pas les joueurs en invalidant la part non-dite de leur narration. Ainsi, quand tu explique que l'épée est cachée sous l'eau, alors que ta mère imaginait qu'elle était enterrée. N'était-il pas possible d'admettre en entendant sa remarque que l'épée était bien enterrée ? je sais que dans prosopopée ce qui est dit est dit, néanmoins n'est-ce pas le rôle du guide d'arrondir les angles pour que les joueurs aient du fun ?

Je te prie de ne pas voir ces remarques comme de quelconques reproches mais vraiment comme des interrogations. J'ai lu prosopopée, mais je ne l'ai pas joué. Et c'est tout à fait louable de tenter l'expérience avec un public âgé et dans une optique thérapeutique.
Millevaux. Post-apocalyptique. Forestier. Sludgecore.

Outsider. Folklore personnel. Auto-édition (un livre par mois). Articles invités sur le processus créatif.
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Thomas Munier
 
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Re: [Prosopopée] Ma première partie

Message par shiryu » 03 Fév 2013, 13:56

Alors dans l'ordre :
de mon côté, j'aimerais bien retenter Prosopopée car j'aime vraiment l'ambiance du jeu. Avec mes parents ? ça va dépendre d'eux. Ils m'ont laissé une porte avec mon oncle qui est très porté sur les mythes et les légendes. L'argument sera : "évidemment, il ne peut pas jouer tout seul. Vous retenter ?". Sinon, je compte bien le faire découvrir à des amis, pas forcément joueur, quand je pars en vacances (le livre ne prend pas de place)
Le problème ressenti par mes parents est justement qu'ils n'ont pas ressenti un amusement via la création mais juste un effort. Mais là, ça vient du public selon moi et je vais essayer d'analyser ça dans l'autre topic (j'ai pas fini)

Je ne regrette pas leur façon de jouer, je m'attendais à des difficultés au départ mais je pensais qu'ils arriveraient à se plonger dans l'ambiance plus facilement quand même (après tout, ils baignent dans les histoires avec mon fils). ma mère par exemple aurait très bien joué si elle avait été une Nuance.

La centrale nucléaire, je vois déjà un Miyazaki avec ce thème, ce n'est pas vraiment le problème, disons que mon père venait de se coller l'étiquette d'écolo sur le dos, il en rajoute une couche avec la centrale, je préférai faire un virage à 180° plutôt que de trouver le compromis. (Quand il a parlé du soulèvement du peuple contre le roi, il a enchainé sur la création de la démocratie, la création de parti avec l'UMP etc..., quand je dis qu'il a fait des propositions stupides, ce n'était pas un jugement de valeur mais bien objectivement contre productif pour le thème).

Pour l'épée de Rolland, j'ai refusé car il ne doit pas y avoir de nom propre. J'ai donc juste gardé l'épée. A ce moment, je n'avais pas encore d'idée sur l'intro.

Pour le non-dit, je suis allé les titiller sur le sujet plutot en 2ème partie de l'histoire car justement, on commençait à avoir des situations du genre "bah non, on a dit ça avant", "non, on a juste dit ça, on n'a pas précisé plus." En fait, chacun commençait à voir une histoire de son côté (et même à faire son histoire de son côté, mon père ne voulant s'occuper que du roi et ma mère de la famine). De plus, mon père faisait vraiment des plans sur la comète en faisant systématiquement des remarques sur la fin évidente. J'ai donc insisté sur le fait qu'on narrait les choses dans l'ordre et qu'il pouvait y avoir des revirements puisqu'une chose pas encore narrée pouvait très bien ne pas pouvoir se produire. (j'ai un problème de clavier, excusez-moi s'il y a des fautes de frappes que je ne corrige pas mais là, je galère). J'ai donc choisi d'illustrer mon propos en creusant le vide.

T'inquiètes, y a pas de mal à poser des questions. Si ça peut te permettre de jouer à Prosopopée rapidement, j'en serai ravi !
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Re: [Prosopopée] Ma première partie

Message par Frédéric » 16 Fév 2013, 13:59

Salut Shiryu, merci pour ce CR très enrichissant.

Si je puis me permettre, je pense que la grande majorité des problèmes rencontrés dans votre partie font partie de la base du contrat social en JDR.
Pour qu'une partie de JDR puisse fonctionner, il faut accepter d'y mettre à peu près le même degré de sérieux, de la part de chaque participant. Il faut accepter de soumettre à d'autres sa propre créativité et laisser de côté son incrédulité concernant les narrations de chacun.

Ça demande bien plus d'investissement et de sérieux que le jeu de société lambda.

Là, clairement, vous avez échoué à presque chaque étape consistant à produire un contrat social opérationnel (malgré une volonté apparente de chaque participant de "jouer le jeu"). Et je pense que l'on peut imputer ce fait au fossé culturel entre tes parents et toi, ni plus ni moins.

Je me souviens d'une assertion d'Olivier Caïra dans Les Forges de la Fiction, concernant la possibilité d'une partie de JDR : le fait que le JDR, malgré le peu de matériel et d'innovation technologique qu'il recquiert, est imputable au besoin de partager un océan de culture fictionnelle commune, rendu possible par la démocratisation du cinéma et des séries TV depuis les années 70 en occident.
J'ai le sentiment qu'il y a une faille à ce niveau-là dans votre groupe : il me semble que vous éprouvez une grande difficulté à harmoniser vos propositions fictionnelles.

Le dernier point concerne la démarche créative : certains disent que chaque démarche créative est innée chez tout être humain. Je n'en suis pas si sûr. Je découvre fréquemment des joueurs hermétiques à une démarche créative particulière.
J'en connais qui ont de grandes difficultés par exemple à appréhender une démarche ludiste : le fait de leur demander d'être performant dans leurs choix pour la partie les stresse beaucoup et ils n'y prennent aucun plaisir.
J'en connais qui n'arrivent pas à s'intéresser aux enjeux des parties narrativistes : ils se retrouvent sans arrêt à chercher la compétition, ou à créer des secrets et des révélations, des manigances qui n'ont pas lieu d'être et qui appauvrissent la dramaturgie des parties.
Mais ces deux démarches ont une particularité : elles sont très liées à des activités extrêmement courantes en dehors du JDR : le narrativisme procure un plaisir dramatique que l'on trouve dans la plupart des œuvres de fiction linéaires. Et le ludisme est clairement proche du plaisir que l'on prend dans la plupart des sports et jeux de société.
Mais qu'en est-il pour le simulationnisme ? (Je rappelle que Prosopopée se veut défendre cette démarche).
Le simulationnisme n'a aucun référent externe pour nous permettre de comprendre ce qu'il s'y joue réellement.
Prosopopée est aussi, de par sa démarche créative, fortement orienté vers la contemplation et le zen. D'où l'absence de compétition et de recherche de victoire. Ceux qui cherchent à jouer dans ce sens-là trouveront au mieux que le jeu est mal fichu.
J'ai déjà eu le cas avec des joueurs dans notre tranche d'âge : viewtopic.php?f=19&t=2671
Cette dimension contemplative est parfois difficile à appréhender pour certains joueurs. Ça peut se comprendre : notre culture ne nous fournit pas beaucoup de références en la matière. Et puis il faut admettre que cela puisse ne pas intéresser certaines personnes, tout simplement.

Cependant, associer Prosopopée aux contes traditionnels est à mon avis un erreur dans le sens où cela peut méprendre sur cette dimension contemplative.

Je serais très curieux de voir jouer tes parents à un bon D&D des familles.
Je suis presque sûr que tu aurais beaucoup plus de succès. ;)
Frédéric
 
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Re: [Prosopopée] Ma première partie

Message par shiryu » 16 Fév 2013, 14:30

C'est clair qu'il y a un paquet de bugs dans notre partie, et mes parents ne sont pas les seuls responsables.
Pour l'accroche du simulationnisme, tel que je le comprend et c'ets pasgagné de ce côté là, c'est d'essayer de reproduire un genre. le cinéma a aussi ses styles et ses canons à respecter (tarantino ne fait que du simulationnisme pour moi).
Avec le recul, la référence aux contes n'est pas géniale mais je pensais toucher une accroche qui n'a pas fonctionné (et je n'avais pas trop d'accroche autre). Même si j'ai essayé de séparer le CR pour aborder des problèmes de débutant (moi et mes parents) et le CR pour aborder les problèmes que j'estimais intimement lié à la nature des joueurs, il est évident que c'est difficile de ne pas prendre en compte leur âge (quoique j'ai essayé de soulever ici des problèmes qui auraient pu se passer avec des joueurs de mon âge qui n'auraient jamais joué à un jeu non traditionnel).
J'ai fait cet effort pour essayer de cadrer aussi mon regard et mon analyse, je voulais qu'il y ait des éléments qui puisse te servir aussi pour des pratiquants plus habituels.
donc (oui, à la relecture, le lien n'est pas évident mais il faut prendre comme ça, désolé), d'accord pour aborder tous les points ici (si christoph est OK).

Pour info, nous en avons un peu reparlé (pas débattu, juste abordé dans la discussion). Le fait que je vais sortir mon jeu et qu'ils me soutiennent toujours dans ce que j'entreprend, je pense qu'il y a moyen de les remettre à un jdr.
j'ai moi aussi penser à un jdr plus classique, rien que pour voir ! DD, je pense que ça n'a pas d'intéret (trop long en fait pour produire une fiction un poil intéressante et si c'est juste pour casser du streum, ma mère n'y verra aucun intéret). Peut être Dungeon World.
Pour info, j'ai pourri mon père parce qu'il n'avait pas fait ses exercices intellectuels cette semaine. Certains sont très chiants. Si il trouve le jdr plus marrant et qu'il perçoit aussi le jeu comme un moyen de travail pour lui, je pense qu'il retentera sa chance (il est orgueilleux de toute façon, il reste rarement sur un échec). Mais a terme, c'est vers Prosopopée que je les ramènerai de toute façon, les autres options que j'ai abordé ne sont que des étapes pour y arriver. C'est vraiment le jeu intergénérationnel pour moi et si le temps m'est permis, nous arriverons à créer une histoire avec mes parents et mon fils à la même table.
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Re: [Prosopopée] Ma première partie

Message par Frédéric » 18 Fév 2013, 21:05

Attention, dire que le simulationnisme consiste à reproduire un genre est limitatif. C'est plus que ça. Il ne suffit pas de jouer à Dust Devils dans le canon du western pour faire du simulationnisme.

De plus, le concept de "genre" est très casse-gueule, car n'importe quelle définition populaire de genre est limitative et perméable à d'autres (certains scénaristes conseillent vivement de mélanger plusieurs genres plutôt que de s'enfermer dans un seul). Certains analystes de la fiction considèrent le principe de genre comme une structure spécifique de la fiction qui se répète dans des histoires types. Il s'agit d'une logique d'enchaînement des événements qui font que l'on sait très bien au début de Maman j'ai raté l'avion (référence débile, je sais, mais que j'espère parlante), que le protagoniste ne perdra pas à la fin de l'histoire.
C'est déjà beaucoup plus intéressant d'un point de vue académique, mais du coup beaucoup plus complexe à aborder. Et le nombre de genres existant s'en trouve assez restreint et parlent de choses structurelles, et non de "est-ce qu'il y a de la magie ou des vaisseaux spatiaux".

En gros, ce que je veux dire, c'est que les genres "drame", "comédie", "fantasy", "space opera", "pulp" etc. sont des définitions qui n'ont aucune solidité théorique, car ce n'est rien d'autre que des étiquettes pour départager les rayons de la Fnac et autres boutiques. Elles n'ont aucune prétention analytiques.
Bien sûr, le cinéma de genre repose sur le fait qu'il s'insère dans des canons préétablis, mais qu'est-ce qui m'empêche de faire un film de zombies dans une histoire de colonisation spatiale et comique de surcroît ?

Enfin, dire que le simulationnisme consiste à reproduire un genre ne tient pas compte de la dimension sociale qui est pourtant l'élément le plus intrinsèque à une démarche créative.
Mais plutôt que d'entrer dans les détails ici, je te propose un article que j'ai écrit à ce sujet : Comprendre le simulationnisme à travers Prosopopée. ;)


Pour tes futures tentatives de Prosopopée en famille, je te souhaite bonne chance. N'hésite pas à nous tenir au courant.
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Re: [Prosopopée] Ma première partie

Message par shiryu » 18 Fév 2013, 21:37

j'avais prévenu que le simulationniste n'était pas gagné pour moi. Bon, ton article, je le lirai avant la prochaine partie. Pour info, j'avais commencé à le lire en me disant "ah oui, prosopopée est narrativiste mais pour montrer qu'un jeu n'est pas à 100% dans une seul démarche, il veut prouver qu'il y a aussi un peu de simulationnisme". Oui, la route est longue... Je précise toutefois que je n'avais pas encore lu ton livre à ce moment là.
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Re: [Prosopopée] Ma première partie

Message par Christoph » 22 Fév 2013, 21:57

Hello

Shiryu, je salue ton courage et ton effort pour écrire un tel rapport, ça ne doit vraiment pas être facile. Chapeau bas. Conseil pour un prochain rapport : ne dissocie pas joueurs et partie : comme ce fil commence à le montrer, ça n’a pas vraiment de sens de parler de la partie en faisant abstraction des joueurs. Pour ceux qui chercheraient la description des joueurs, c'est ici.

Frédéric, je te trouve sévère et peu charitable. Affirmer que ces gens ont « échoué à presque chaque étape consistant à produire un contrat social opérationnel » est assez choquant, je ne sais pas si tu réalises. Au contraire, j’affirmerais que le trio a parfaitement réussi à établir un contrat social (définition rôliste), même s’il n'est pas conventionnel pour un groupe de jeu de rôle, puisque je suppose que le but premier était de faire faire une activité stimulante au père de Shiryu, en famille. Pas de contrat social, ça se traduit tout simplement par des gens qui s’engueulent, qui arrêtent de jouer, qui quittent la table. Leur contrat était a fortiori fonctionnel, car ils ont joué une partie sans causer de tort à qui que ce soit (pas de chantage émotionnel, pas de moqueries blessantes, pas d’atteintes à la dignité, etc.) Peut-être n’était-ce pas la plus réussie des parties en termes d’emploi des règles ou d’esthétique ou de performance rôliste, mais on ne peut pas dire qu’ils ont échoué à établir un contrat social fonctionnel.

D’un point de vue théorique, je trouve ton recours à Caïra trompeur. Tout ce que cet auteur affirme, c’est que l'émergence du jeu de rôle a été possible à cause de ce que tu cite, historiquement. Maintenant qu’il est là, il est là, et je n’ai pas l'impression que Caïra prétend étendre son argument à des cas individuels. D’ailleurs, les parents de Shiryu ont probablement vécu la majorité de leur vie après l’apparition des premiers jeux de rôle. Je ne nie pas que Shiryu rapporte des difficultés dans le fait de jouer dans cette configuration, mais le problème des références communes en est un non pas parce qu’elles n'étaient pas disponibles (le fils joue depuis des décennies), mais parce que les parents ne s’y étaient jamais intéressés à fond. (Si jamais, Gary Alan Fine décrit dans sa thèse publiée en 1983 l’idée que dans un groupe de jeu de rôle les gens se forgent des références communes, ce qui peut faire penser à l’idée de Caïra superficiellement.) A priori, rien n’empêche donc à ce groupe d’apprendre à développer des références suffisantes ensemble, si ce n’est peut-être malheureusement la maladie du père, dont j’ignore à peu près tout, mais qui est le véritable cœur de ce rapport de partie.

À ce titre, j’aurais quelques remarques techniques à adresser à Shiryu, dans l’espoir qu’elles lui permettront d’améliorer leur pratique de ce jeu s’ils devaient s’y relancer.

Il me semble que vous êtes partis du mauvais pied quand vous avez fait du paradigme un symbole de la discorde sociale régnant entre le méchant roi et le gentil peuple. Tout de suite, le problème principal semble se situer entre humains, alors que Prosopopée se propose être un jeu qui examine les difficultés à faire co-exister harmonieusement communautés humaines et nature. Des joueurs chevronnés sauraient immédiatement que ce clivage roi-peuple n’est qu'un symptôme superficiel, et ils dirigeraient la partie vers la recherche de causes plus prosopopéennes. Les déséquilibres que vous avez déclarés sont tous des problèmes sociaux affectant le peuple, ce qui renforce mon impression que vous n’étiez pas parti dans la bonne direction. À ce propos, en combien de temps avez-vous déclaré les trois premiers problèmes ?

Autre application des règles pas tout à fait canonique, le fait qu’un Médium foudroie le roi. Les médiations sont non-violentes de manière inhérente et ce pour une très bonne raison : ça oblige les joueurs à chercher un compromis, à rééquilibrer de manière constructive, à tenter de comprendre le problème. Nous avions tenté une partie volontairement sombre à l’époque du développement du jeu, et ce n’était pas concluant, donc je soupçonne que même des joueurs à l’aise avec le jeu auront du mal à faire quelque chose de bien en ayant recours à la violence via les médiums (les autres personnages c’est une autre discussion).

Si tu gardes ces deux notions en tête, j’ai bon espoir pour vous que si vous deviez retenter l’expérience, vous joueriez des parties de Prosopopée plus satisfaisantes, moins « cluedo ». Je ne nie pas que tes analyses sur les autres points sont pertinentes et que ton « ordre du jour » puisse être utile pour lancer une partie, mais ces deux points sont essentiels pour que les joueurs comprennent ce qu'ils sont censés faire, et je pense que pas mal de problèmes sont secondaires par rapport à ça (c'est très prosopopéen de voir ça comme ça!) Bien sûr, il faut apprendre à jouer quelque part, mais ça se fait en jouant, et ça va mieux si on prend le jeu dans le bon sens.

Même si ce que dis le psy qui a répondu sur le blog de Thomas Munier est vrai (voir le fil sur les joueurs), à savoir notamment qu’il n’est pas évident pour une personne atteinte de Parkinson « 1) à mettre en mémoire de nouvelles informations et 2) à initier des stratégies efficaces de recherche en mémoire des informations déjà acquises », je pense que Prosopopée est un très bon choix de jeu pour vos buts. Je tiens à repréciser que je n’ai pas la moindre idée de ce qu’est cette maladie au quotidien, et encore moins comment on peut la gérer, je ne fais que proposer une idée qui pourrait prendre compte de cet avis formulé par un expert.

La clé réside probablement dans le système de récompense. En effet, il s’adapte en temps réel à chaque groupe. Plus vous y joueriez, plus vous (ta mère et toi au moins) développeriez une notion commune de ce qui vaut un dé d’offrande ; en particulier, vous pourriez différencier ce qui vaut un dé pour ton père, ta mère et toi (sans forcément en discuter explicitement, je pense qu’on peut y arriver de manière « organique »). En allant ensuite dans le sens que tu as déjà soulevé concernant le fait que tu aurais mieux fait de jouer le Médium et tes parents les Nuances (ce avec quoi je suis d’accord), ton père pourrait aisément se concentrer sur le présent et principalement octroyer des dés pour de belles descriptions, des gags amusants (pourquoi pas ?), etc. Prosopopée n’exige pas une cohérence aussi stricte que ce que les rôlistes ont tendance à exiger de leurs parties. Si ta mère et toi vous vous concentriez plus sur l’évolution dans le temps, vous trouveriez un partage des tâches affiné par rapport au modèle générique de Médium et Nuances. S’il s’avérait que ton père s’en sort mieux que prévu, les règles s’adaptent naturellement puisque on ne définit jamais formellement ce pour quoi on donne un dé d’offrande. C’est tout bénéfice.

Finalement, si la durée s’avère un problème, restreignez-vous peut-être à un seul déséquilibre par tableau, ou limitez-en la valeur (à 3 maximum, par exemple). Les fixer à l'avance risque de donner un cas d'enquête, car on présente les participants avec un Problème à résoudre. Peut-être est-ce une restriction sur la profondeur qu’on peut obtenir avec ce jeu, mais l’essentiel reste disponible : une structure bien foutue pour une activité créatrice en famille.
Innommable: hurlez.
Zombie Cinema, en français dans le texte.
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Re: [Prosopopée] Ma première partie

Message par Frédéric » 23 Fév 2013, 13:49

Concernant "l'échec à presque tous les niveaux du contrat social", c'est vrai que j'y suis allé un peu fort. Je m'excuse si ça pu être interprété violemment.
Pour expliquer le fond de ce commentaire, les remarques de Shiryu m'ont donné le sentiment qu'à aucun moment ou presque, les participants n'ont réussi à s'entendre sur ce à quoi ils jouaient ni à prendre du plaisir ensemble (peut-être que je me trompe à ce sujet, Shiryu, n'hésite pas à apporter des précisions si besoin).
Bien sûr, le Contrat social parle aussi de logistique et de relationnel (entre autres).

Pour ma référence à Olivier Caïra, en effet, lui ne parle pas de ce qu'il se passe pendant les parties.
Mais pour plusieurs de mes jeux, j'ai rencontré des personnes incapable de contribuer en phase avec la démarche du jeu :
À Démiurges, une dame qui n'avait pas vraiment de culture de fictions "fantastiques" n'a pas réussi à participer une seule fois.
Dans Les Cordes Sensibles, j'ai vu plusieurs joueurs n'ayant aucun intérêt pour les fictions dramatiques transformer le jeu en jeu de baston verbale sans aucun sérieux.
Et je pense (donc, ça c'est uniquement ma réflexion à moi) qu'il y a besoin pour la plupart des jeux d'un référentiel commun pour que ça fonctionne.
Prosopopée est plutôt large, mais le coup de la centrale nucléaire, de l'épée de Roland et la nature des Problèmes intégrés pendant le jeu me semble imputable à une distance entre les cultures fictionnelles des participants (mais je peux me tromper, bien entendu, ce que j'avance là est purement spéculatif).


Sinon, Shiryu, je n'ai sans doute pas assez insisté quant au fait que j'étais très enthousiaste devant ta démarche que je trouve admirable.
J'ai réagi assez négativement car les difficultés que tu rapportes m'ont renvoyé à des parties difficiles que j'ai jouées, mais à ce stade, ça vaut le coup d'être optimiste et de chercher comment améliorer votre prochaine partie.

Autre chose : quand tu t'es amusé à intégrer dans l'histoire des choses en contradiction avec la vision de la situation de tes parents, j'en parle un peu dans les règles du jeu il me semble, mais c'est un bon moyen de faire comprendre aux participants que la seule qui compte, c'est ce qui est dit. Si tu dis qu'un type arrive sur le chemin, que tu l'imagines à cheval sans le préciser, c'est normal que d'autres participants décident qu'il est à pied ou sur un nuage flottant et tu dois l'accepter, que les autres s'approprient ta création. Il est primordial que les participants n'anticipent pas l'histoire dans leur tête, qu'ils acceptent que les choses prennent des directions inattendues, voire qui leur échappent totalement.

Apprécier Prosopopée, c'est apprécier l'instant présent (et non pas faire ses petites manigances en anticipant sur l'histoire), c'est prendre du plaisir devant le fait qu'une narration est judicieuse ou surprenante et devant le fait qu'au final, la cohérence de l'histoire soit solide.
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Re: [Prosopopée] Ma première partie

Message par shiryu » 07 Mars 2013, 22:01

Je tenais à clore officiellement ce fil de discussion puisque selon les règles du forum, la discussion doit être soutenue par l'auteur du fil.
En effet, je ne partagerai pas plus avec vous de cette expérience (car le coeur n'y est plus), tout comme je n'aurai pas la possibilité d'en exploiter vos retours. Suite à des problèmes de santé graves, mon père a pratiquement perdu l'usage de la parole.
Toutefois, je mettrai cette discussion en lien sur d'autres forum en espérant que cela serve à d'autres, ou donne des idées pour que d'autres osent.
Merci à Thomas pour avoir devancé cette initiative.
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