Vendredi dernier, dans le cadre de mon activité journalistique de swiss made JdR, je suis allé à une soirée JdR à Soleure, la dice night. Jusque là, ça ne semble pas très original mais je dois préciser que Soleure est une ville germanophone, certes à 35 minutes de train de chez moi (soit moins que mon lieu de travail) mais germanophone tout de même. Il me fallait donc jouer en allemand.
Je veux également préciser une chose pour les non-suisses du forum : En Suisse 63% de la population utilise officiellement l'Allemand. C'est une simplification regrettable car en réalité, ils parlent différents dialectes (qui se caractérisent par des bruits de fond de gorge, même les Ricolas n'y font rien) très différents du "bon allemand" (l'Allemand standard, langue poétique de Goethe). Un Allemand aura beaucoup de peine à comprendre un Suisse allemand.
Les Suisses allemand savent en principe le bon allemand mais ils le maîtrisent pas tous parfaitement et ils le parlent avec un accent caractéristique de leur langue maternel (venant du fond de la gorge).
(Mon ton sarcastique se veut de l'humour, j'aime beaucoup la majorité linguistique de mon pays)
Pour ma part, je maitrise plutôt bien l'allemand standard par contre je comprends très très mal le dialecte. Il m'a fallu donc demander si c'était possible de jouer en bon allemand.
Trois jeux s'offraient à moi :
- Warhammer fantasy
- D&D
- Un jeu dont j'ai pas bien compris ce que c'était. Ca me semblait être COPS, mais je ne garantie rien.
Je me suis lancé dans D&D. A la table, un MJ de la quarantaine, sa fille préado, un gamin préado également (je crois que c'était un ami de la fille), un mec d'environ 25 ans et moi.
Le MJ et les deux jeunes jouent de longue date ensemble (surtout avec sa fille, à ce que j'ai compris). Nous jouerons donc dans leur univers à la suite de leurs aventures. Le mec de 25 ans et moi sommes donc les seuls à devoir faire un perso.
Le système de jeu était un système de jeu "maison" à base d'un d20. C'était très proche de ce que je sais de D&D mais j'avais jamais jouer à un tel système exactement. (on m'a expliqué qu'il n'y avait pas d'XP. C'était un système où tu augmentes de niveau à ton anniversaire. J'ai par contre pas bien compris si c'était à l'anniversaire du joueur ou du personnage)
La fille jouait une magicienne elfe, elle m'explique qu'elle sait parler Gobelin et que c'est super important dans cette univers. En fait, elle parlait vraiment gobelin, elle avait un cahier où elle avait écrit des mots de vocabulaires "allemand-gobelin". Ainsi, durant le jeu, je ne serai jamais sûr si elle parlait gobelin ou le dialecte allemand de ses ancêtres.
Le garçon est un guerrier.
Je me crée un personnage adapté à mes compétences linguistiques : un nain stupide (peu d'intelligence, ce qui peu expliqué mon manque de compréhension des situations). La création a été un peu longue (j'ai du déterminé dès le début si je savais bouchoyer ou cuisiner)
Le mec a créé un personnage de halfling qui était intelligent (j'étais le bras, il est la tête)
Je ne vais pas entrer dans les détails de la fiction, voici simplement les grandes lignes :
- On fait la garde sur une plateforme et en bas il y a un orc qui gueule. Le halfing comprend juste le mot "Gold". On doit attendre le lendemain pour descendre.
- On trace l'orc (on a tous 10 gobelins sous nos ordres. Ne me demandez pas pourquoi. La magicienne qui parle gobelin a dressé les siens pour suivre les traces)
- On découvre un lieu où ils ont campés. On y trouve le cadavre d'un orc qui est mort avec plein de mycoses sur son corps.
- On continue les traces jusqu'à une grotte. Dans la grotte, on découvre des signes gobelins et des huttes de shaman avec des zombies (orcs et gobelins)
- On fout sur la gueule des zombies. Je ne connais pas la fin du combat car je dois aller prendre mon train.
Cette courte expérience m'a beaucoup appris sur les manières de faciliter un JdR entre plusieurs langues. C'est clair que ça n'a pas été facile et que mes bonnes compétences en allemand ont aidées. Mais je me suis à présent persuadé qu'il est possible de jouer avec des compétences linguistiques limitées. Bien entendu, il faut pour cela adapter le jeu. Voici quelques constatations :
1) Le JdR est un jeu qui utilise les représentations communes : il faut donc choisir un univers épuré et générique qui est partagé par tous. Exemple : je ne comprenais pas toute les spécificités de cette univers et ça m'a mis en porte à faux plusieurs fois lors de la partie.
2) Le JdR est basé sur la communication mais pas uniquement verbale : des images, des cartes ou des schémas valent souvent beaucoup plus qu'une longue explication. Durant la partie, il n'y en a pas eu. C'est que lorsque l'on s'est retrouvé dans la grotte avec les huttes de shaman que mon collègue de 25 ans a dessiné une carte au MJ pour savoir si les lieux correspondaient bien à ce qu'il imaginait. Je vous assure qu'une carte m'a beaucoup aidé.
3) Le JdR utilise un vocabulaire spécifique mais assez limité : Ils y a le vocabulaire des règles : une feuille de perso bilingue aurait été bienvenue, une feuille de traduction "français-allemand" de quelques mots de vocabulaires spécifique tels que les races ou des éléments récurents de l'univers, on peut même imaginer une feuille de voc supplémentaire spécifique au scénario.
4) Le JdR est une activité fatigante mentalement qui demande de l'attention : A ce titre, il faut préférer des scénarios courts car comprendre une autre langue et être attentif demande de gros efforts.
Voilà les grandes lignes
Cette expérience a été enrichissante et va me remettre sur les rails d'un projet que j'ai laissé de côté : un JdR suisse dont j'avais parlé sur le forum viewtopic.php?f=11&t=1641